Fan fiction

 

Evolvana

  

Chapitre 5 : Croisement des destins…

 


        Le vent était glacial en ce début de printemps. Mais sur le continent nord, c'était l'hiver tous les jours… Les forêts de conifères étaient plus noires qu'à l'habitude : un orage se préparait… Le scooter des neiges s'arrêta soudain, et Ninsun serait tombée si son oncle ne l'avait pas retenue.
" Qu'est-ce qu'il se passe ? " demanda-t-elle, inquiète de voir Laocoon stopper en plein milieu du bois sombre.
" T'as pas vu quelque chose passer ? L…là, devant, vers la grosse souche.
- Oh, arrête, tu m'as déjà fait ce coup là… je suis plus une gamine !
- Je te jure que…
- Bah, c'était sans doute un chocobo sauvage, y'en a plein par ici.
- Euh, quand même, Ninsun ! Je sais différencier un grizzly d'un chocobo !
- UN GRIZZLY ??!!
- Euh… ouais… je crois qu'il vaut mieux pas rester là…
- Comme tu dis ! FILONS !!! "
Mais c'était déjà trop tard, une énorme créature velue s'était mise en travers de leur chemin. Chacune de ses griffes avait la taille d'un bras humain et ses dents encore dégoulinantes de sang étaient plus aiguisées que la lame d'un poignard. Laocoon mis machinalement la main à son holster, mais se souvint soudain, à son plus grand désespoir, qu'il avait entrepris de nettoyer son arme le matin et qu'il l'avait laissée sur sa table de travail. " On est mal barrés… " souffla-t-il. Ninsun, elle, avait déjà pris son Rotator et y avait incrusté sa matéria Alexander. Laocoon fut surpris d'une réaction aussi vive de la part de la jeune fille. Lui qui la connaissait si timide, si peureuse…
" Tu avais pris ton arme ? demanda-t-il étonné.
- Quoi, ça se voit pas ?! lui répondit-elle avec humeur. Ne reste pas planté là, ou tu vas te faire bouffer !
- T'es sûre que tu sauras le battre ? lui jeta-t-il. Il est sûrement…
- ON A PAS D'AUTRE CHOIX A MON AVIS ! cria la jeune fille pour couvrir les grognements de l'énorme animal. SI ON PREND LA FUITE, ON DEVRA ABANDONNER LE SCOOTER, ET SANS LUI ON IRA PAS BIEN LOIN !!! "
Voyant le grizzly avancer dangereusement, Ninsun attaqua la première. Son arme longue portée lui permettait de garder des distances raisonnables entre elle et son ennemi… La lame circulaire fut propulsée d'un coup et vint lacérer la jambe gauche de l'affreux animal. Un hurlement lui indiqua que son attaque avait été réussie. La jeune fille regarda le projectile revenir s'enclencher dans le propulseur accroché à son bras… Le problème, c'est qu'elle ignorait combien il restait de vie à la bête. L'avait-elle gravement blessé ?… Ou n'était-ce qu'une égratignure pour lui ?…Elle vit soudain que le monstre avait changé de position et s'apprêtait à bondir. " Bondir ? pensa-t-elle. Plutôt charger, car son poids et sa blessure le gênent sûrement… " Mais, trouvant sa force d'on ne sait où, le grizzly sauta toutes griffes dehors… pour atterrir derrière la jeune combattante, dans un long hurlement.
        " Ninsun ! cria Laocoon. Regarde ! "
La jeune fille se retourna, incrédule. La bête était en train de se battre avec… un énorme loup des montagnes ! Ils se donnaient mutuellement des coups de griffes, de dents, le sang giclant de tous côtés et laissant de longues traînées rouges sur la neige. " Profitons-en ! " lui lança Laocoon en regagnant le véhicule. Ninsun courut et vint se placer sur l'engin, derrière son oncle. Il démarra dans un énorme vrombissement, laissant derrière lui les deux colosses dans leur combat mortel…

        " Ah !  s'exclama Laocoon en arrêtant le scooter des neiges devant une petite maison isolée. Enfin arrivés ! " Le ciel était à nouveau d'un bleu éclatant et les rayons du soleil rendaient l'endroit beau et accueillant. Ninsun gravit les marches de la maison et toqua trois petits coups à la porte. " Espérons qu'il soit là… " murmura-t-elle pour elle-même. Une voix éraillée lui parvint de l'intérieur : " Entrez, entrez ! " La jeune fille, rassurée, ouvrit la porte et fit signe à son oncle de la suivre. L'atmosphère du petit chalet était chaude et douce : un feu brûlait dans la cheminée et des chocobos caquetaient gaiement en se donnant de petits coups de bec.
        " Venez ! n'ayez pas peur ! continua le vieux Sage. Que voulez-vous ?
- Euh… je voulais vous demander… vous avez un chocobo doré, n'est-ce pas ?
- Un quoi ?
- Un chocobo doré ! un chocobo jaune brillant, quoi ! comme de l'or ! s'exclama Ninsun.
- Ah ! je vois !… mais ne vous énervez pas ! fit-il en souriant (du moins si l'on pouvait appeler ça un sourire, car son gros visage mauve et noir n'avait rien d'humain)
- Vous l'avez, cet animal ? demanda Laocoon en regardant autour de lui.
- Eh ? ah ! le chocobo ! oui, oui, je l'ai… enfin non…
- Vous l'avez ou pas ? dit Ninsun, essayant de ne pas paraître énervée. On a fait un long chemin pour arriver jusqu'ici, et j'espère que ça n'a pas été pour rien…
- Il doit être dehors… oui, oui ! c'est ça, je l'ai mis dehors pour qu'il broute un peu d'herbe…
-  ? ? ? ? un chocobo ne broute pas d'herbe ! ! !… s'étonna le chasseur de trésors en interrogeant du regard sa nièce.
- Ne fais pas attention à ce qu'il dit, il devient un peu gâteux… chuchota la jeune fille à son oreille. Je vais voir dehors si le chocobo en question est bien là. Tu peux essayer de le convaincre de nous le prêter ? "
Devant le signe de tête approbatif de son oncle, Ninsun sortit de la maison. Elle n'avait pas vu l'oiseau qu'elle cherchait dans la petite étable où jouaient les autres. Peut-être gambadait-il dans les alentours ? Elle suivit un petit chemin tracé par le foulement régulier des pattes des chocobos et arriva à une grande plaine d'herbe verte.  Des fleurs des montagnes poussaient un peu partout et la vue était magnifique. Ninsun soupira en regardant le panorama qui s'offrait à ses yeux. Vraiment, ça changeait de la forêt noire…
        " Kweeek ! "
La jeune fille se retourna. C'était bien un chocobo qu'elle avait entendu ! Mais la plaine était vide, à part quelques papillons qui voletaient de temps à autres autour des fleurs. Elle regarda tout autour d'elle, en vain. Elle s'apprêtait à repartir quand un autre cri se fit entendre. Là, son regard fut attiré par une forme mouvante jaune qui se dandinait sur le versant d'en face. Un chocobo doré était poursuivi par un monstre !  Ninsun les vit arriver vers elle. Si elle sauvait le chocobo, il serait peut-être reconnaissant et elle pourrait plus facilement l'apprivoiser. " Et si le Sage ne veut pas me le prêter… je lui volerai sans qu'il le voit et il croira sûrement que son cher petit animal s'est enfui ou a été mangé par un monstre… " Elle se demanda d'où lui venaient toutes ces idées si peu honnêtes mais ne s'en soucia plus dès que le monstre fut à sa portée. Il s'agissait d'un loup des montagnes de taille assez conséquente, et Ninsun fut ravie de trouver enfin une occasion d'utiliser son invocation Alexander. Qu'importe si l'ether s'épuisait vite, l'argent qu'elle gagnerait au combat lui permettrait d'en racheter. " Surtout, ne pas toucher le chocobo… pensa-elle en armant son Rotator. Il va s'enfuir, sinon, et dans ce cas il sera presque impossible de le retrouver… "
        Elle réfléchit et se rendit soudain compte que si elle utilisait son invocation, l'oiseau serait touché au même titre que le monstre… mais l'utilisation du Rotator dans cette situation était assez délicate, étant donné que sa cible était continuellement en mouvement et que le chocobo tournait bêtement autour du loup… " On verra bien… " fit-elle en déclenchant le propulseur. La lame circulaire atteignit le flanc du monstre, coupant au passage quelques plumes dorées du chocobo. Le loup, terrorisé, s'enfuit en gémissant et disparut bientôt derrière les rochers. L'oiseau jaune restait stupidement là, au milieu de la plaine, à regarder curieusement Ninsun.
" Kweeeeeek ! " fit-il joyeusement. " Il ne s'est même pas rendu compte que la lame était passée à quelques centimètres de sa tête… " pensa la jeune fille en approchant le chocobo. Il la laissa lui caresser le dos et ne bougea pas quand elle voulut le monter. Elle le guida et rebroussa ainsi chemin jusqu'à la maison du Sage. A ce moment même, Laocoon en sortait en claquant la porte. A son air, la conversation avait dû tourner au vinaigre. " Quel imbécile ce @#*$ ! ! ! il n'a même pas accepté l'idée de se séparer quelques jours de son " chocobo adoré "… Il s'arrêta soudain de parler en voyant Ninsun, tranquillement installée sur l'animal en question.
" Comment… ?
- Eh ! l'action vaut mieux que les mots…
- Hum ! il ne vaudrait mieux pas qu'il voit ça…
- Bof, t'inquiète pas, il a l'air de ne jamais sortir de chez lui, ce frileux…
- Je préfère ne pas prendre de risques… Tiens ! j'ai acheté quelques chocolégumes… je crois que je me suis fait arnaquer, il m'a vendu ça hyper cher… Mais… qu'est-ce que tu veux faire de cette bête ?
-   Euh… j'ai fait un pari avec un ami… il m'a juré que les chocobos d'or n'existaient pas ! Eh bien, je vais lui démontrer le contraire. "
Laocoon eut l'air satisfait de cette réponse évasive et s'installa sur son scooter des neiges. " On fait la course ? " dit-il ironiquement. Ninsun savait que les chocobos dorés étaient réputés pour leur rapidité et leur résistance.
" Pourquoi pas ? " fit-elle avec un grand sourire. Son oncle la regarda d'un air surpris et se décida enfin à dire : " Comme tu veux… celui ou celle qui arrive à Icicle en premier gagne une matéria…
- Comment ça ? je n'ai qu'une matéria et je ne veux pas la donner…
- C'est pour ça qu'il va falloir t'accrocher pour réussir l'épreuve !
- Ah ah… Je suis venue pour gagner, pas pour jouer… je te préviens, tu vas perdre ! "
C'est ainsi qu'ils partirent pour leur village dans une course effrénée, ignorant les monstres qui se trouvaient sur le chemin et qui ne purent voir qu'une forme noire et une comète jaune filer à toute allure à travers les bois…


*  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *
        
" Tu as bientôt terminé ? " fit une voix derrière la porte. Sephiroth soupira et détacha son regard de la glace devant laquelle il se tenait. De nouvelles cicatrices venaient de s'ajouter aux anciennes et sa peau ressemblait à un champ de bataille. Le jeune homme reprit sa matéria de régénération et tenta d'effacer une nouvelle fois la trace de ses blessures. Il n'y arriva qu'à moitié, mais le résultat lui parut assez satisfaisant. Il se rhabilla en prenant soin de ne pas se faire mal et alla ouvrir la porte de la chambre.
" Dépêche-toi ! Les cours ont déjà commencé, on va se faire tuer !
- Ouais… je sais.
- Euh… ça fait peut-être pas de différence pour toi mais moi je tient pas à me faire frapper…
- Alors pourquoi tu m'as attendu ? demanda Sephiroth avec un air sarcastique.
- Hum… allez, faut se dépêcher, on déjà beaucoup en retard ! répondit l'autre pour détourner la conversation.
- On va encore finir au fond…
- Arrête ! La prof t'adore, elle ferait jamais ça !
- N'importe quoi ! Mademoiselle Liseau, m'adorer ? c'est de la science-fiction…
- Sa façon de te faire toujours son plus grand sourire quand elle te parle… sa manière de se mettre derrière toi pour voir si t'as bien fait tes exercices…
- Arrête, arrête ! quelle horreur…
- Eh ! elle est pas mal, quand même… Le problème c'est qu'elle est hyper sévère…
- C'est pourquoi il faut se dépêcher au lieu de dire des âneries ! Allez, Zack ! "
Les deux garçons coururent à travers les couloirs et arrivèrent enfin, essoufflés, devant la porte de la classe… Elle était fermée. Mauvais signe. Sephiroth frappa deux petits coups. Ils entendirent des pas (des talons hauts, d'après le bruit) s'approcher de la porte. Elle s'ouvrit d'un seul coup, pour faire apparaître le visage sévère du professeur. Dès qu'elle reconnut Sephiroth, ses traits se détendirent et un grand sourire illumina son visage. " Oh, c'est toi…Tâche de ne plus être en retard la prochaine fois… " Son sourire disparut quand elle vit Zack par-dessus l'épaule de son élève favori. " Zack Fielding ! Je parie que c'est encore de ta faute, ce retard ! " Sephiroth plongea ses beaux yeux bleu-vert dans ceux de Mlle Liseau.
" Non, je m'excuse, c'est à cause de moi. " dit-il posément. La jeune femme ne sut que dire sur le moment, mais se reprit bien vite.
" Hum ! Quoi qu'il en soit, il est temps d'aller vous asseoir et de suivre le cours. Allez, entrez… "


Ensuite vint le tour du sport. Depuis quelques temps ce n'était plus Arawn qui les surveillait mais un autre homme, nommé Fujimi. Sephiroth se souvint de ce qu'il avait vécu l'année passée… l'internement dans les cachots de Darkmoan, les combats, les coups de fouets, on pourrait même parler de torture tellement Arawn était doué pour faire souffrir et trouver les moyens pour rendre les douleurs impossibles à supporter. Sephiroth avait maintenant 16 ans, et il semblerait qu'Arawn se soit un peu calmé. Non, tout compte fait, ce sadique était impossible à calmer. Il avait été relevé de certaines de ses fonctions à cause d'une dispute avec un inspecteur, le premier depuis bien longtemps, et ne s'occupait désormais plus que de la section combat. Ce changement profitait ainsi à Sephiroth qui pouvait s'entraîner plus librement en sport, sans crainte d'être frappé ou renvoyé. En effet, Arawn s'arrangeait souvent pour que le jeune homme ne puisse pas faire de sport, ou alors sous haute surveillance.
Sephiroth regarda les autres élèves entrer dans le gymnase et sourit. Evidemment, il s'entraînait le plus possible pour pouvoir enfin battre l'homme qu'il détestait le plus au monde…
" Bon ! cette fois, je vais faire deux groupes… commença Fujimi. J'ai remarqué que certains étaient à la traîne… et d'autres plutôt forts, je dois l'avouer. Je viendrai voir de temps en temps comment se débrouillent les plus doués, mais je resterai en grande partie avec les plus faibles. "
Il cita les noms de ceux qui devaient aller dans le groupe A, dont faisait partie Zack. Le garçon n'était pas très doué en sport, même s'il y mettait de la bonne volonté… Fujimi observa des pieds à la tête les élèves qui restaient.
" Vous… vous êtes l'élite, fit-il en souriant. Bien, je pense que vous savez ce qui vous attend… " Un " non " se fit entendre parmi les jeunes gens et des rires fusèrent. " Eh bien… reprit le professeur, vous avez l'air en forme…(puis, remarquant soudain les blessures de Sephiroth) Qu'est-ce qu'il t'est arrivé, toi ? " L'adolescent garda le silence mais ne baissa pas les yeux. Fujimi continua :
" Tu sais, tu peux parler, je ne vais pas te manger ! " Sephiroth croisa les bras.
        " Encore heureux… "
De nouveaux rires se firent entendre.
Le professeur le regarda attentivement. Cet élève devait être le plus mystérieux de tous ceux qu'il connaissait. Mais il était de loin le meilleur…
        " D'où te viennent ces blessures ? si tu t'es fait ça en entraînement au combat, ce n'est pas normal. Vous devez tous impérativement passer à l'infirmerie si vous avez des blessures…
- Mais… c'est déjà fait.
- Comment ça ? on ne verrait plus de cicatrices si c'était le cas !
- Hum… c'est tout ce qu'on a pu faire pour moi… "
Fujimi l'examina de la tête aux pieds. Des blessures guéries grâce à la magie, et dont il restait encore les traces ? Alors elles devaient être remarquablement profondes ou données avec une grande violence pour que l'effet soit tel…Comment avait-il pu se faire ça ? Les autres devaient sûrement savoir… mais il ne préférait pas leur demander comme cela, en public, et surtout devant Sephiroth. Il attendrait le moment propice…
        " Bon, quoi qu'il en soit, reprit-il, vous allez commencer tout de suite les entraînements. Tractions, pompes, musculation… ensuite je vous ferai faire un peu d'endurance, ça ne vous fera pas de mal. Allez-y ! "
        Il regarda ses élèves se mettre au travail mais retint cependant Sephiroth. " Attends ! "
Le jeune homme lui jeta un regard interrogateur. Fujimi soupira et le regarda. " Tu ne peux pas faire de sport dans cet état. "
Sephiroth eut un sourire gêné. " Ne vous inquiétez pas pour moi. J'ai déjà fait sport dans de plus mauvaises conditions… et je suis encore là. "
 Le professeur le regarda partir d'un air perplexe avant de se diriger vers le groupe A, une étrange impression dans l'âme…


*  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *


Ninsun était assise sur son lit, admirant une petite sphère verte qu'elle tenait dans sa main. " Je lui avais dit que je gagnerais… " soupira-t-elle en rangeant la matéria Feu dans son sac à dos. Elle avait fait garder le chocobo par un de ses amis d'Icicle, qui lui avait promis de ne rien révéler à qui que ce soit. La jeune fille espérait qu'il dise vrai… Rien à craindre du côté de Laocoon : elle lui avait dit qu'elle ferait la surprise à ses parents en leur montrant l'animal légendaire. Elle avait décidé de partir une bonne fois pour toutes, et ses affaires étaient déjà préparées là, dans un coin de sa chambre. Avec les économies qu'elle avait, elle s'était acheté une matéria de régénération, des potions, des ethers et deux tentes, au cas où. Elle n'avait pas eu assez d'argent pour acheter des remèdes, et espérait donc ne pas en avoir besoin jusqu'à la prochaine ville où elle ferait étape. Quand partirait-elle ? Dans la nuit, sûrement. Elle laisserait un mot sur son bureau pour ne pas inquiéter ses parents.
Ninsun regarda sa montre. Bientôt l'heure du dîner… le départ était proche. Pourvu que ses parents, ou Tamusiga, ne la voient pas s'en aller…

Le repas fini, Ninsun remonta dans sa chambre. Elle attendit que ses parents ainsi que sa sœur aillent se coucher pour entrouvrir la porte et risquer un regard dans le couloir. Personne en vue… elle prit délicatement son sac et son Rotator et descendit sans bruit les escaliers. Elle savait où se trouvaient les clés de la porte de devant, mais vu le bruit qu'elle faisait en s'ouvrant, mieux valait prendre la porte de derrière, celle de la cuisine. Les clés de celle-ci étaient toujours accrochées sur le mur… La jeune fille se dirigea vers la cuisine et y entra. Mais la nuit était plus noire que jamais et elle ne voyait pas où elle mettait les pieds. Heureusement, sa connaissance de la maison l'empêcha de se heurter à la table et aux chaises. Mais comment allait-elle trouver la clé ? Si elle allumait la lumière, elle se ferait sûrement repérer ! Et puis zut, il n'y avait pas de raison qu'ils se lèvent et voient par mégarde la lumière dans la cuisine… La jeune fille se glissa tant bien que mal (à cause du sac et du Rotator) vers l'interrupteur et appuya dessus. Une lumière aveuglante remplaça subitement la pénombre et Ninsun cligna des yeux un instant. " Ah ! voilà les clés ! " pensa-t-elle en les prenant délicatement. Elle ouvrit la petite porte avec le plus de discrétion possible et se glissa à l'extérieur. Elle allait se diriger vers l'étable où son ami l'attendait avec le chocobo quand une voix s'éleva derrière elle.
" Ninsun… "
La jeune fille se retourna brusquement pour faire face à sa sœur, qui se tenait dans l'encadrement de la porte. " Où tu vas comme ça ? " lui lança celle-ci.
" Euh… ça ne te regarde pas…
- Mais si ! surtout si tu as une arme et un sac de voyage entre les mains…
- Parle pas si fort ! les parents vont t'entendre…
- Alors dis-moi ce que tu vas faire.
- Je vais… LE chercher, LE trouver et L'aider. "
Tamusiga regarda sa sœur avec un air étrange. " Je m'en doutais un peu… " fit-elle, songeuse. Elle regarda Ninsun plantée au milieu de la rue déserte. La détermination dans les yeux de celle-ci lui rappela soudain la guerrière apparue dans les illusions. Cet air triste et responsable à la fois…
        " Pars vite. Et tâche de le sauver. "
Ninsun resta bouche bée. C'était bien Tamusiga qui venait de lui dire ça ?
        " Tu… tu ne diras rien aux parents… tant que je serai pas partie du village, hein ?…
- Dépêche-toi. Tu perds ton temps à parler avec moi. Si tu te fais attraper… tout ton plan foire. Je sais pas quand tu reviendras, mais je sais que tu me manqueras pas… mais bon, j'aimerais pas qu'il t'arrive quelque chose de fâcheux, OK ? Fais attention à toi. "
Ninsun la regarda une dernière fois, puis lui fit signe de la main. Tamusiga la regarda partir dans la pénombre et ne put s'empêcher d'avoir un serrement au cœur. C'était peut-être la dernière fois qu'elle voyait sa sœur…
        " Tamu ? Qu'est-ce que tu fais dehors à cette heure !?! " fit une grosse voix derrière elle. La jeune fille sursauta. Son père…
        " Euh… il y avait un clebs qui arrêtait pas d'aboyer… j'arrivais pas à dormir… mais bon, je l'ai fait fuir. Tu l'a pas entendu ?
- Tu mens très mal, Tamusiga. Je suis passé dans la chambre de ta sœur, elle n'y était pas. Mais toi tu le sais, hein ?! DIS-MOI !!!
- Non, je t'assure…
- Ne te fous pas de moi, je t'en prie ! Elle est où ?!!
- Merde, je sais pas ! je peux pas l'inventer !!! "
Elle reçut une gifle retentissante. Tenant sa joue meurtrie avec sa main, elle s'enfuit en courant s'enfermer dans sa chambre. Le père resta planté là, sur le pas de la porte de la cuisine, rouge de colère.

        Ninsun monta sur le chocobo d'or et dit adieu à son ami. Elle réalisa soudain que pour sortir du village, elle devrait repasser devant chez elle. " Espérons que le chocobo ne fera pas de bruit en passant, sinon… Sinon je piquerai un sprint jusqu'à ce que je sois hors de portée !… " La jeune fille tourna le coin de la rue et vit avec angoisse que son père était là, sur le pas de la porte, semblant guetter quelque chose… elle, bien sûr ! Tamusiga lui aurait-elle parlé de sa fuite ? Non, elle ne pensait pas… sinon elle l'aurait fait alors que Ninsun était encore proche de la maison. Elle sentit que son cœur battait à tout rompre. Que faire ? La seule solution était de faire courir le chocobo à toute allure jusqu'à la sortie du village… pas très discret, mais elle ne voyait pas d'autre moyen. Elle mit son plan à exécution. Mais au moment de passer devant la maison, le chocobo s'arrêta net.
        " Mais qu'est-ce qu'il fout cet abruti ??? " pesta-t-elle en donnant des petits coups de pied sur les flancs du chocobo. C'était le dernier endroit où il fallait s'attarder !
        " NINSUN !!! QU'EST-CE QUE…
- Tais-toi ! Tu vas réveiller les voisins ! lui lança-t-elle pour gagner du temps, tout en essayant de trouver un chocolégume.
- Comment oses-tu me parler sur ce ton ? Viens ici, tout de suite !
- NON, je pars ! Pour plusieurs années, peut-être !
- QUOI ?! Mais qu'est-ce qui te prend ?
- J'ai une mission, un idéal. Les idéaux sont faits pour qu'on les réalise, une vie sans idéal n'est rien. Le mien, je l'ai trouvé, et je vais le suivre.
- Mais de quoi tu parles ?
Ninsun se rendit compte de ce qu'elle venait de dire. Ce n'était pas elle, là, qui avait parlé, ou du moins qui avait construit ces phrases. C'était une voix au plus profond de son âme…
- Je pars. Adieu. J'aurais aimé que ça se passe moins brutalement, mais avec vous c'est impossible… Je saurai me débrouiller… Dis à Maman qu'elle ne s'inquiète pas. "
Elle trouva enfin un chocolégume et le balança sous le bec du chocobo, qui réagit soudain. Il l'avala d'un coup et cela eut l'effet d'un coup de fouet. L'animal partit d'un seul coup et Ninsun s'accrocha de justesse. Elle entendit son père crier, loin derrière.
        " NINSUN !!!! Si tu pars, tu n'auras pas l'argent que tu as récolté en servant au bar !!!! TU N'AURAS RIEN !!!! "
La jeune fille fut dégoûtée de ces paroles. Il n'avait trouvé que ça pour la retenir ?
" TU CROIS VRAIMENT POUVOIR ACHETER MES SENTIMENTS AVEC DE L'ARGENT ? lui cria-t-elle. TU PENSES POUVOIR CHANGER MON COMPORTEMENT AVEC DU FRIC ??? TU NE COMPRENDRAS JAMAIS RIEN !!! "
Mais ses paroles furent emportées par le vent glacial qui soufflait en une longue complainte. Bientôt elle ne vit plus qu'une forme indistincte et lumineuse derrière elle. Les lumières d'Icicle, qu'elle voyait peut-être pour la dernière fois de sa vie…
 
        
*  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *


        
        " Le voyage a été long, mais on est enfin arrivés… " soupira le lieutenant Gündoan en franchissant les portes de Nibelheim. Il jeta un œil vers le groupe du commandant Regan. Les jeunes gens avaient l'air impressionnés par l'atmosphère qui régnait dans le village. Une brume grisâtre les avait enveloppés instantanément dès qu'ils s'étaient approchés des monts Nibel. Personne dans les rues ; la petite ville semblait abandonnée…
        " Eh bien… c'est désert ici… souffla Intyre en regardant autour de lui.
- Mmm… je crois qu'ils ont surtout peur de nous…lui répondit Kargin. Et puis… il est encore tôt…
-  Alors, il est où ce fameux manoir ? s'impatienta Gadjaya. Depuis le temps qu'on en parle, j'aimerais quand même le voir.
- Ah, ne sois pas si impatiente… regarde, c'est là, au bout de la rue…Mais moi je ne suis pas trop pressé d'aller " récupérer des documents spéciaux "… parce que mobiliser un escadron entier de tireurs d'élite pour quelques petits documents, je trouve ça un peu excessif…
- Ouais… c'est louche tout ça… murmura la jeune fille.
- Pas tant que ça, intervint Intyre. Le manoir a l'air grand, et d'après ce que j'ai compris il servait de laboratoire, entre autres… bref… il y a sûrement des cobayes dangereux qui se baladent un peu partout… "
Gadjaya frémit en pensant à ce qui allait sûrement les attendre dans la grande bâtisse Shin-ra. Des ennuis en perspective…

        Toute la troupe entra dans le bâtiment sombre. Des toiles d'araignée étaient accrochées un peu partout dans l'entrée, et, étrangement, il n'y avait aucune trace de poussière sur le sol. Le lieu semblait inhabité depuis au moins quelques années…
        " Hum… on ne voit aucun monstre… commença un jeune soldat de l'équipe du commandant Regan, appelée aussi équipe 1. Pourtant le sol est rayé, comme par… des griffes… "
        Le lieutenant s'abaissa et examina les traces. En effet, les rayures avaient l'air récentes… ça expliquait la poussière casi-inexistante sur le sol, alors que les rares meubles en étaient recouverts. Les bêtes allaient et venaient en toute liberté dans le manoir, puisque personne n'osait y rentrer… Mais le silence était total. Pas de grognements, pas de bruits de pattes, rien.
        " Que fait-on, mon commandant ? demanda Onuki Gündoan. Tout ça me paraît suspect…
- Nous n'allons pas rester là sans rien faire, lieutenant. Mon équipe ira explorer l'étage pendant que la vôtre s'occupera du rez-de-chaussée. Au boulot ! "
Regan, ainsi que ses cinq jeunes soldats, gravirent les escaliers. Les marches grinçaient sous leurs pieds, et la faible lueur émanant des hautes fenêtres ne suffisait pas à rassurer les adolescents.
        Onuki regarda autour de lui. La salle du bas était composée de plusieurs pièces : l'immense hall central, flanqué d'une petite pièce de chaque côté. Au fond de la salle, dans l'ombre de l'escalier se trouvaient encore des portes, mais le lieutenant ne préférait pas s'y aventurer pour l'instant. A vrai dire, cette mission était l'une des plus étranges qui lui avait été donnée jusqu'alors. Retrouver des documents que la Shin-ra avait laissés là, au manoir de Nibelheim… Cette bâtisse servait encore il y a quelques années aux soldats de passage… mais ce n'était plus la magnifique demeure qu'elle était dans le temps. A ce qu'il avait entendu, ce manoir était jadis le plus luxueux des alentours, les ornements et les dorures se comptaient par milliers et on ne cessait de parler des somptueuses salles de bal de la demeure. C'était le temps où la Shin-ra n'utilisait pas tout son argent à faire des recherches sur l'énergie Mako…
        " On ne va pas se séparer pour l'instant. Nous ignorons encore quel genre de monstres rôde dans les parages… il faut donc être très prudents. Commençons par la salle de gauche. "
Les six adolescents ainsi que le lieutenant entrèrent dans la petite pièce. Elle était encombrée de meubles de toutes sortes et sentait un peu le moisi. Kargin s'approcha d'une petite table et tapota de la main une étrange machine dotée d'un écran plutôt poussiéreux. " L'ancêtre de l'ordinateur " ironisa-t-il. Gadjaya s'avança à son tour pour observer le petit engin. Alors qu'elle s'apprêtait à l'examiner, un bruit, comme un froissement de papier, parvint à ses oreilles.
" Tu as marché sur quelque chose, Gadjy… "
     La jeune fille regarda à ses pieds. En effet, elle découvrit sur le sol un vieux papier journal froissé. Elle se pencha et le prit. Des mots étaient alignés fébrilement sur la feuille jaunie. Gadjaya entreprit de déchiffrer le texte :
        " Je dois me débarrasser de tout ce qui entrave mes recherches. Même de ce type des Turks. Je l'ai scientifiquement modifié, et il dort au sous-sol. Si tu veux le trouver, alors fouille la zone. Mais… ça ressemble à un petit jeu auquel j'ai pensé. Il est inutile que tu y participes si tu n'en as pas envie. "
        Sa lecture achevée, la jeune fille regarda tour à tour les membres de l'équipe. " Qu'est-ce que ça signifie ? Qui a écrit ça ? "
        Le lieutenant s'approcha d'elle et demanda à lire le papier. Ne comprenant pas non plus de quoi il s'agissait vraiment, il relut le texte plusieurs fois.
        " On dirait que c'est incomplet… où se trouve le " petit jeu " dont on parle ici ? tu es sûr qu'il n'y a pas une autre lettre ?
- Si, là ! s'exclama Intyre en ramassant une autre feuille de papier jauni. C'est sûrement la suite, non ? regardez ! "
Il tendit le document à Onuki.
        " Tourne le cadran du coffre-fort délicatement, mais rapidement. Tu as 20 secondes. Tu ne peux pas dépasser les chiffres pendant que tu tournes. Les 4 astuces concernant les chiffres sont… "
        Kargin croisa les bras. " Hum… ça m'a tout l'air d'une énigme, ça… si je comprends bien, il faut trouver le code d'un coffre-fort pour libérer un gars au sous-sol ? C'est zarbi, comme histoire…
- Tais-toi, Kargin ! laisse-le continuer, il y a autre chose… " soupira Intyre.
        Onuki reprit sa lecture de l'étrange texte :
" 1) Le couvercle de la boîte avec le plus d'oxygène.
2) Derrière le piano.
3) La crique située à terre près de la chaise au 2eme étage… ensuite cinq crans à gauche, neuf crans vers le haut, deux crans à gauche et six crans vers le haut. "
        " Qu'est ce ça veut dire ? " soupira le lieutenant.  Je ne crois pas qu'on ait le temps de s'occuper d'une  telle énigme…
- Euh… il n'y avait que trois indices, là, non ? Je croyais que dans la lettre ils parlaient de " 4 astuces " ?
- Effectivement, il y a un problème… ce papier a l'air de dater un peu, le quatrième indice a dû être effacé…
- Je pense qu'il faut garder tout de même ce document, il pourrait nous être utile… déclara Méjan, un garçon qui jusque là n'avait pas osé parler. Si vraiment il y a un type emprisonné au sous-sol…
- Je n'ai jamais entendu parler d'un sous-sol ici, s'étonna Onuki. Nous sommes à l'étage le plus bas, j'ai l'impression…Mais cette demeure recèle de nombreux secrets, peut-être qu'avec un peu de chance nous arriverons à trouver ce fameux endroit. Mais… ça m'étonnerait que nous ayons le temps de nous attarder ici… "
N'ayant rien trouvé d'autre dans la pièce, les jeunes soldats sortirent et parcoururent le hall pour atteindre l'autre salle. Mais soudain, un énorme craquement se fit entendre.
        " C'était, QUOI, ça ? " s'exclama Kargin. Il n'eut pas le temps d'en dire plus. Une gigantesque lame fondit sur le petit groupe.
        " BAISSEZ-VOUS ! ! ! " cria le lieutenant.
Les adolescents eurent tout juste le temps de se jeter au sol quand la lame passa au-dessus de leur tête. Onuki leva les yeux pour essayer de reconnaître leur assaillant. Il fut étonné de voir que ce qu'il prenait pour de simples lames étaient en fait ce qui constituait le bas du corps d'un être étrange : sa tête ainsi que son torse était humain, mais ses jambes avaient été remplacées par des plaques de fer tranchantes. Onuki se rendit à l'évidence : c'était un cobaye de laboratoire… il s'agrippait comme il pouvait à une chaîne ¾son seul moyen de déplacement-¾ et semblait s'être " réveillé " à leur approche.
        Gadjaya regarda le plafond, pour découvrir avec horreur que des dizaines de ces créatures étaient là, accrochées comme des insectes aux lustres et aux moindres renfoncements du mur.
        " Qu'est-ce qu'on fait, lieutenant ? On l'attaque ?
- C'est plutôt lui qui nous attaque à mon avis !
- Vous avez vu tout ce qu'il y a au plafond ? on pourra jamais tuer tout ça !
- Qui vous parle de les tuer ? on s'occupe seulement de ceux qui nous cherchent des ennuis ; les autres on va pas aller les chercher !
- On reste à plat ventre et on lui tire dessus, mon lieutenant ? s'enquit Méjan.
- Evidemment ! lui répondit l'officier. Si on se lève il va nous couper en deux ! "
Les jeunes soldats préparèrent leur arme. Comme prévu, Kargin avait réussi à faire livrer à l'escadron Ultima de bonnes armes. Ainsi, Gadjaya avait récupéré un pistolet argent, Intyre un blaster type Ultech 507 et Kargin s'était débrouillé pour se garder un Vif-argent K-2, une des meilleures armes longue portée du moment.
        " J'ai la première balle " dit Gadjaya. Elle avait chargé son arme avec ses nouvelles munitions shrapnel, ce qui promettait de donner de l'effet… Elle tira. La créature, sans cesse en mouvement, évita la balle.
        " Tu devrais t'acheter des lunettes ou inclure un viseur à ton pistolet, la railla une jeune fille rousse nommée Soya. Allez, à moi. " Gadjaya sourit en voyant le monstre esquiver une nouvelle fois le tir. Cette fois, c'était le lieutenant Gündoan qui armait son Lazura or. Leur monstrueux ennemi était en train de vivre ses dernières secondes…
        Ce qui se vérifia quand la créature tomba lourdement sur le sol, un trou fumant au milieu du front. Les soldats se relevèrent et regardèrent autour d'eux. Pas d'autre monstre en vue… Mais ce n'était pas le bon endroit où il fallait s'attendre à voir débouler un ennemi. Gadjaya examina le plafond. Non, apparemment, ceux-là avaient l'air endormis, mais il suffirait du moindre bruit pour les réveiller. La jeune fille en avertit l'officier. " Effectivement, c'est là-haut qu'ils se nichent pour piquer un somme… espérons qu'il soit le plus long possible. En attendant, tentons de rester discrets, on ne sait pas combien ils seront à nous tomber dessus, la prochaine fois. "

        Une demi-heure plus tard, l'équipe 2 était réunie au grand complet dans ce qui avait dû être une somptueuse salle de bal. Tout était délabré, mais gardait tout de même l'ombre de son image passée dans la poussière et dans l'oubli… Le regard de Gadjaya fut attiré par un grand miroir terne, trônant sur la haute cheminée. Son âme sembla soudain s'y plonger…

        Les invités étaient tous là, le bal pouvait commencer. Myn se retourna en sentant une main fine se poser sur son épaule.
" Mélléane… je n'y croyais plus.
- Désolée d'être en retard, mon amour… J'ai rencontré Mme De Bernais en venant ici, et…
-   Jannina De Bernais ? la femme du colonel Kurt ? hum… c'est une vraie pipelette. On l'engagerait presque pour faire louper les rendez-vous des gens ! fit-il d'un ton railleur.
- Allez, ne te moque pas de moi… tu me pardonnes ? dit-elle en lui  caressant la joue.
- Ah, si on me prend par les sentiments… " fit-il en se penchant doucement pour embrasser la jeune femme.
Mais une voix tonitruante le fit stopper son geste. Un homme arrivait, bras grands ouverts, vers le jeune officier.
" Lieutenant Valentine ! que je suis heureux de vous revoir parmi nous ! "
 Le jeune homme reconnut le  général  Donos Repness. Bien sûr, il était moins svelte qu'il y a quelques années et des cheveux gris commençaient à apparaître sur ses tempes ; mais ses traits et son air jovial étaient  toujours les mêmes.
" Alors, comment va votre femme ? demanda Myn, qui connaissait la nature fragile de la personne en question. Et le fils ?
- Parfait, parfait, merci ! la seule chose qui me désole est de savoir que vous repartez dès demain en mission pour Mideel…
- Hein ? intervint Mélléane, qui jusque là s'était contentée d'écouter. Tu ne me l'as pas dit, ça ! fit-elle en lançant un regard indigné vers son mari.
- Eh bien… je comptais te le dire tout à l'heure…pour ne pas gâcher la soirée… répondit le lieutenant d'un air gêné.
- Allons, allons, Madame !… s'exclama Repness. C'est pour la gloire de la Shin-ra naissante que votre mari se bat ! c'est une noble cause, aisément pardonnable.
- Je crois que je vais devenir jalouse de cette Shin-ra qui m'enlève mon mari à toute les heures du jour et de la nuit… soupira la jeune femme en resserrant son étreinte autour de Myn. Puis, s'adressant à celui-ci : J'espère au moins que tu seras là pour la naissance du petit…
Le général fut stupéfait de la nouvelle.
- Vous attendez un enfant ? c'est formidable !… C'est pour bientôt ?
- Logiquement, il reste encore pas mal de temps, répondit Myn avec un sourire radieux. La technologie, de nos jours, fait des prodiges : nous avons déjà pu savoir que ce serait un garçon.
- Ah, voilà une bonne chose ! s'écria avec joie le vieil officier. Un futur militaire !
- Pour l'instant, nous espérons seulement que tout se passe bien, se contenta de dire le jeune homme. Votre fils, lui, veut devenir officier, non ?
- Oh oui ! il est très motivé pour ça, et j'en suis heureux ! Phanan n'a que quinze ans, mais il est assez doué pour son âge, je dois l'avouer. "
La musique commença soudain, et un air de valse emplit la grande salle dorée. Une jeune femme au piano jouait admirablement bien, et les notes se répercutaient dans l'immense pièce comme une douce mélodie angélique.
        " Et comment va s'appeler ce petit chérubin ? " s'enquit Repness. Les deux jeunes gens se regardèrent et sourirent.
        " Vincent. C'est joli, non ? "


        Gadjaya se sentit soudain très lasse. Que s'était-il passé ? Elle avait vraiment eu l'impression de se retrouver dans cette… illusion ? Elle regarda une nouvelle fois le grand miroir. Toujours aussi terne. Rien n'avait changé.
        " Eh, Gadjy, qu'est-ce que tu fais ? "
Intyre se trouvait derrière elle. Il la regarda d'un air interrogateur.
        " Eh bien, il te captive, ce miroir…lui lança-t-il. Allez, viens, les autres sont déjà dans l'autre pièce. "
        La jeune fille s'apprêtait à le suivre quand quelque chose par terre, à côté du piano, attira son regard. Elle se pencha et découvrit un code gravé sur une des lattes du plancher. " Gauche 10 ? " lut-elle à haute voix. Elle comprit soudain de quoi il s'agissait. " Intyre ! je crois que j'ai trouvé une partie du code du coffre-fort ! le code du deuxième indice…
- Ah ouais ? super ! il faudrait que l'on trouve le reste, pour bien faire… Alors… le couvercle de la boîte avec le plus d'oxygène… pfff… j'en ai aucune idée… tu as les papiers ?
- Non, c'est Kargin qui les a gardés, je crois…
- Bon, alors il vaudrait mieux ne pas trop tarder, on va les rejoindre. "
Elle le suivit et traversa des couloirs sombres et étroits. Et dire que jadis tout ça n'était que dorures, clarté, luxe… elle avait du mal à croire que ça ait pu tant changer. Elle ne se posa bientôt plus de questions concernant le miroir. Après tout, la magie était partout, en toute chose, et cet objet avait sûrement été imprégné plus que les autres. Il avait gardé des sons et des images que seuls ceux qui avaient l'esprit ouvert à ce genre de choses pouvaient percevoir.  

        Bientôt tout le monde était à nouveau regroupé dans le hall principal. Le lieutenant Gündoan regarda autour de lui d'un air inquiet.
        " L'autre équipe n'est pas là ? soupira-t-il. Je sens qu'il va falloir partir à leur recherche… Allez, tous à l'étage ! "
Les jeunes gens arrivèrent bientôt au premier, mais aucune trace de l'autre groupe. Certains jetèrent un regard par la première porte. Une chambre, apparemment… Kargin s'aventura dans une petite pièce circulaire, la seule à peu près claire du bâtiment. Une lumière poussiéreuse enveloppait les plantes vertes, posées ça et là sur des étagères. Le jeune homme eut soudain une idée.
        " Le couvercle de la boîte…avec le plus d'oxygène… ça ne peut être qu'ici ! " Il entreprit de dévisser tous les couvercles des boîtes qui contenaient des végétaux. Après cinq minutes de recherches, il découvrit enfin ce qu'il cherchait. Au dos d'un couvercle était inscrit le code " Droite 36 "
        " Eh, tu as vu ? lança-t-il à Intyre quand celui-ci approcha. J'ai trouvé le premier code !
- Bien. Il ne nous en reste plus que deux à trouver, maintenant.
- Deux ?
- Oui, Gadjaya en a découvert un tout à l'heure, le deuxième.
- Allez, remuez-vous les gars ! s'exclama Soya qui venait d'arriver. Ne suis-je pas merveilleuse ? j'ai trouvé l'indice 3 !
- Où est-ce que tu es allée chercher ça ?
- Dans une autre salle, là-bas. J'ai suivi les indications qui étaient sur le papier que tu m'as prêté. Tiens, le voilà. "
Kargin prit le document jauni et interrogea la jeune fille du regard.
        " Oui… le code est… attends… 59 Droite !
- Sûre ?
- Sûre ! Aussi sûre que Gadjaya ne sait pas viser !
- Bref il faut peut-être que j'aille vérifier le code… " grommela Intyre qui n'appréciait vraiment pas les manières de la jeune rouquine.
L'adolescente se contenta de hausser les épaules et partit en direction des autres membres de l'équipe 2. Les deux garçons la suivirent et découvrirent de nouvelles salles, dans l'autre aile du bâtiment.
        " Oh, attend !  s'exclama soudain Kargin. Le coffre est de l'autre côté.
- Peut-être, mais il nous manque le quatrième code.
- J'ai peut-être une idée… "
L'adolescent prit la feuille d'indices et demanda un briquet à son ami. L'autre, étonné, lui en tendit un, se demandant ce que son compagnon pourrait bien faire avec ça. Il le sut aussitôt qu'il le vit passer la flamme sous le papier, assez loin cependant pour ne pas le brûler, mais de manière à faire apparaître une écriture noirâtre sous les trois premiers indices.
        " Ah-Ah ! Tu as vu ça ? lança-t-il à Intyre. J'ai vu juste… alors… Droite 97…
- Super ! mais il faudrait peut-être avertir le lieutenant avant d'ouvrir le coffre… tu crois pas ?
- Bof, pas la peine… ce n'est qu'un coffre… "
Sur ce, les deux garçons rebroussèrent chemin pour se retrouver dans la salle du coffre-fort. Celui-ci paraissait immense, avec ses deux mètres de haut… Kargin, assez habile en tout ce qui était mécanique et informatique, tourna le plus vite possible le cadran du coffre en essayant de rentrer les bons codes.
        " Raté… j'ai voulu aller trop vite… "
A la troisième tentative, le coffre s'ouvrit enfin. Une matéria rouge fut projetée hors du coffre... ainsi qu'un énorme monstre ! ! !

        " Mais qu'est-ce qu'ils font ? soupira Gadjaya. Oh, ça fait bien un quart d'heure qu'ils sont partis…
- Comment ? s'exclama le lieutenant. Mais ils sont fous ! s'ils se font attaquer…Allez, vous autres ! fit-il en s'adressant au reste du groupe. Venez, retournons dans l'aile gauche du bâtiment ! "
Soudain un hurlement bestial déchira l'air.
        " Oh non… "

        Quand ils arrivèrent sur le lieu du combat, tout n'était plus que chaos. Kargin semblait blessé au bras, mais les deux adolescents s'étaient placés loin de l'énorme bête bariolée qui s'agitait au milieu de la pièce sombre. Cependant, à cause de la petite taille de celle-ci, leur sécurité était compromise. Le lieutenant se plaqua contre le mur et fit signe à tous les autres d'en faire autant. A son signal, tous les adolescents tirèrent sur le monstre. Du sang gicla à travers la pièce, l'horrible bête hurla. Mais ce n'était pas fini : leur ennemi était bien plus résistant qu'il ne le paraissait. Il se transforma en une abominable créature dont les tentacules redoutables s'agitaient à travers la pièce, en une danse mortelle. Kargin tira. La balle égratigna à peine le monstre ! Apparemment, sa transformation l'avait rendu beaucoup plus puissant… Soudain, le monstre s'avança. Il brandit un de ses tentacules et l'abattit sur le lieutenant, qui se trouvait plus en avant que les autres.
        " NOOOOONNN ! ! ! " cria Soya. Elle se précipita vers son supérieur, qui, étalé au sol, semblait suffoquer. La jeune fille se leva et utilisa sur lui sa magie curative. Le sort commençait à faire effet quand un autre tentacule, avec encore plus de force cette fois-ci, faucha l'adolescente. Elle fut projetée contre le mur, qui trembla sous le choc.
        Intyre regarda la jeune fille retomber mollement sur le sol à deux mètres de lui, le crâne fendu et les vertèbres cassées sous la violence du coup. Cependant il n'arriva pas à pleurer. Il y avait bien trop d'autres vies en jeu, et par leur faute qui plus est, pour s'apitoyer sur le sort de Soya. L'heure des larmes n'était pas encore arrivée ; maintenant, c'était l'heure de se battre. Le jeune homme régla son blaster en position " mort sûre " et laissa l'énergie se charger au maximum. Quand l'indicateur annonça la surcharge, Intyre appuya sur la gâchette. Une secousse ébranla la salle ; le jet d'énergie avait été envoyé. Une explosion monumentale eut lieu. Les adolescents relevèrent la tête : ce qu'ils virent les laissa stupéfaits. L'ignoble monstre gisait sur le sol, et il ne restait plus rien de ce qui avait dû être son crâne…
        Intyre se releva. Sa main était presque totalement brûlée… la surcharge d'un blaster était très efficace sur les ennemis mais cette méthode avait ses dangers… l'arme lui avait explosé entre les mains juste après la projection de la salve d'énergie. Le jeune homme regarda Kargin. Celui-ci avait du mal à retenir ses larmes… non pas à cause de sa blessure, mais de tout ce gâchis. Soya était morte et le lieutenant avait l'air bien mal en point…
" Mon lieutenant ! allez, reprenez-vous ! " criait Méjan en essayant tant bien que mal d'utiliser des potions. L'officier, après quelques minutes, se releva avec beaucoup de peine. Il avait encore l'air très faible mais parvenait à tenir sur ses jambes. Il jeta un regard las aux deux adolescents qui étaient à l'origine de cette catastrophe.
" Ce…monstre est sorti… quand vous avez ouvert le coffre ?… murmura-t-il.
- Oui, c'est ça…nous… nous sommes désolés, c'est de notre faute… " balbutia Intyre.
Le lieutenant ne répondit rien. Le lourd silence était vraiment gênant… Gadjaya détourna les yeux du cadavre de Soya.
" Qu'est-ce qu'on en fait ? " fit-elle en montrant le corps inerte sur le sol. Onuki Gündoan soupira. Comment allaient-ils faire ? Peut-être valait-il mieux trouver d'abord l'autre équipe pour ensuite décider du sort de la jeune fille… Il ouvrit la bouche mais n'eut pas le temps de répondre : trois monstres oranges déboulèrent dans la pièce, ricanant et voletant au-dessus des têtes des adolescents.
        " Qu'est-ce que… ? des citrouilles ? " s'étonna Fim, un jeune rouquin. Il arma son pistolet et tira sur la première des créatures. Elle fut seulement blessée, et se déplaça jusqu'à la plus grande fenêtre. Un énorme bruit emplit la salle. Un bruit de… respiration étrange.
        " ATTENTION ! ! !  Elles soufflent un gaz dangereux ! ! ! ! " cria Onuki. Tous les jeunes gens s'abaissèrent pour éviter la nappe de gaz rose. Malheureusement, Méjan fut tout de même contaminé. Il toussa fortement et s'affaissa. Fim Joko allait venir l'aider quand l'adolescent lui pointa le canon du pistolet sur le front. " Qu'est ce… " commença à dire Fim. Le lieutenant regarda la scène avec horreur. Méjan avait absorbé le gaz qui rendait fou ! S'il n'intervenait pas… L'adolescent mit son doigt sur la gâchette.
        " MEJAN ! ! ! NE FAIS PAS CA ! ! ! ! "   hurla le lieutenant. Trop tard. Fim tomba sur le sol en un bruit sourd, un trou fumant dans la tête. La scène n'avait duré que deux secondes, et tout se passait trop vite pour réaliser tous les malheurs qui s'abattaient en même temps sur le petit groupe. Fou de rage, Intyre lança le dernier remède qu'il avait sur Méjan. Mais celui-ci semblait possédé. Il ne regarda même pas la solution à son malheur tomber à quelques centimètres de lui. La fiole retomba sur le sol en mille éclats de verre, libérant le liquide magique qui se répandit sur le plancher.
        " MAIS… " s'exclama Intyre, dans l'incompréhension générale. Kargin tira sur la créature précédemment touchée, qui ne mourut pas pour autant.
        " Intyre, essaie plutôt de massacrer ces saloperies, plus tôt le combat sera fini, mieux ce sera ! " lui lança Gadjaya.
Le jeune homme se demanda comment ils pourraient venir à bout de ces trois monstres… si au moins ils avaient une matéria d'invocation… Le regard de l'adolescent fur attiré par une petite sphère rouge, à côté du coffre-fort. Mais oui ! la matéria qui avait été expulsée du coffre lors de son ouverture ! Le jeune homme courut aussi vite qu'il put ramasser la boule magique. Dès qu'il la toucha, un nom s'imposa subitement à son esprit. " Odin… "
        L'adolescent se retourna, le sourire aux lèvres. Enfin, il pourrait arrêter ce cauchemar... Mais ce qu'il vit à cet instant lui fit perdre immédiatement le sourire. Méjan, assis à l'autre bout de la salle, le pistolet à l'envers dans les mains, avait posé le canon de l'arme sur son front. Intyre sentit un froid immense l'envahir…

        " Papa ? " le petit garçon blond courait à travers toute la maison. " Papa ? " Pas de réponse. Maman était partie faire des courses dans Mideel et Papa était censé être dans sa chambre. Il lui avait dit d'un ton fatigué : " Ecoute, mon petit chéri, Papa est épuisé… il va aller dormir un peu, d'accord ? ne le dérange pas… " Le petit garçon avait acquiescé avec un grand sourire est était parti jouer dans le jardin. Mais ça faisait bien deux heures qu'il s'amusait ainsi et il avait commencé à s'ennuyer. C'est pourquoi il fallait aller réveiller Papa. Pour qu'il lui raconte une histoire, ou qu'il le prenne sur ses genoux, comme il le faisait tous les soirs. Le petit garçon courut jusqu'à la salle de bains. Il n'était pas ici non plus… Soudain retentit un coup de feu, puis un bruit de chute. L'enfant s'affola. Que s'était-il passé ? ça venait de la cuisine… Haletant, la garçon courut jusqu'à la pièce en question. Un corps inerte gisait là, sur le sol, un revolver entre les mains… la table empêchait à l'enfant de voir de qui il s'agissait. Le garçon contourna celle-ci et vit avec horreur QUI était ce cadavre, un trou fumant dans la tempe. Le sang recouvrait partiellement le visage, mais ça ne pouvait être que lui. Le jeune garçon éclata en sanglots.
        " PAPA ! ! !… "

        Intyre essaya de chasser ce souvenir. Mais il ne pouvait rien faire pour Méjan. Trop loin, trop tard… la balle partit. Et atteint sans mal son but. Le jeune homme s'écroula sur le sol, le corps secoué de spasmes. Intyre combina avec rage la matéria rouge avec son bracelet Dragon. " OOODIIIIIIIN ! ! ! ! ! ! ! ! " hurla-t-il, des larmes de désespoir coulant sur ses joues, sans qu'il ne puisse rien y faire. Soudain, tout sembla disparaître autour des monstres. Une brume grisâtre enveloppa les ténèbres et une falaise apparut. Un grandiose chevalier se dressa à son sommet, une énorme épée à la main. Une épée à la lame d'acier…Puis  une immense lune se dessina derrière lui… Le chevalier fit bondir sa monture ¾ un étrange cheval à six pattes ¾ pour fondre sur l'ennemi. De plusieurs monumentaux coups d'épée, il coupa en morceaux les immondes créatures qui avaient causé tant de malheurs aux adolescents.
Bientôt l'image du terrible dieu disparut. Il ne restait plus des monstres que quelques lambeaux de chair orange sur le sol…


*  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *

 

Dès que les cours furent finis, le professeur Fujimi décida de sortir un peu de la salle de travail dans laquelle il était depuis le début de l'après-midi. Il se souvint soudain qu'il avait quelque chose à faire. Il prit son manteau, rangea ses affaires et s'apprêta à partir quand une voix l'interpella. " Monsieur Fujimi… " L'homme frémit. Il savait bien à qui appartenait ce ton roque et grave…
" Oh, Monsieur Arawn… " fit-il en se retournant. L'autre le fixa longuement avant de dire : " Vous vous occupez de la classe A-2, n'est-ce pas ? " Le professeur se demanda pourquoi Arawn lui posait cette question.
" Euh… oui, oui… mais seulement pour le sport…
- Alors… dites-moi qui est le plus… disons… doué.
- Doué ? Eh bien, il y en a quelques-uns…
- J'ai dit LE plus doué. Répondez à ma question !
Le ton haineux qu'avait pris Arawn glaça le sang du jeune professeur. Mais pourquoi lui parlait-il ainsi ? Bien sûr, il savait la réputation qu'avait l'homme à Darkmoan. On le disait très violent, mais ses cours n'étant jamais surveillés que par lui, aucun enseignant n'était là pour le prouver. Seules l'apparence et l'attitude parlaient, mais c'était déjà bien assez pour se faire une idée du personnage…
- Euh… oui, le plus doué… Sephiroth Hokorima, je dirais.
- Il se débrouille si bien que ça ?
Fujimi avait horreur de vanter les qualités de ses élèves, ou bien de les rabaisser. Il avait toujours l'impression d'être injuste envers les autres… Soudain, une voix féminine retentit derrière les deux hommes.
- Sephiroth ? Oh, ce garçon m'épate, vraiment ! C'est de loin l'élève le plus brillant qu'il m'a été donné d'éduquer !
- Mlle Liseau…grogna Arawn en se retournant. Monsieur Fujimi et moi parlions.
La jeune femme s'aperçut avec terreur de qui il s'agissait. De dos, elle l'avait pris pour un de ses collègues… elle se sentit rougir et balbutia :
- Oh, Monsieur Arawn… je suis désolée…
- Humph… grogna-t-il. Laissez-nous maintenant.
La jeune professeur quitta la salle, confuse. Arawn regarda Fujimi avec un air dur.
- Alors ?
- Eh bien… ce garçon a de grandes capacités, il s'améliore de jour en jour… répondit l'enseignant d'une voix presque inaudible.
- Ah… ça m'étonne beaucoup. Il est carrément nul au combat.
- Ah bon ? c'est surprenant, en effet… ses qualités physiques lui permettraient d'être un combattant hors-pair…
- Il ne l'est pas. Loin de là. C'est même pitoyable, je pense que je devrais carrément l'interdire de combattre, tellement il ralentit les autres. C'est un poids… Mais il faut une autorisation du professeur de sport pour le dispenser de combat… Cette règle est absurde, mais il faut malheureusement s'y plier…
- Mais je ne peux pas l'interdire de combat comme ça ! Je ne l'ai jamais vu se battre, il est donc ridicule de…
- Vous ne me croyez pas ? ! ! le coupa sèchement Arawn.
- Je… si, mais…
- NE DISCUTEZ PAS. A l'origine, c'était moi qui m'occupais de la section combat, tout aurait été si simple ! Je me demande bien pourquoi ils ont mis une loque comme vous à la place. Vous êtes incapable d'éduquer ces morveux correctement ! Vous avez intérêt à me donner cette dispense avant demain soir, sinon… vous le regretterez  sûrement… "
Sur ce, Arawn partit en claquant la porte. Cette conversation avait ébranlé Fujimi. Il ne s'était pas attendu à une réaction aussi violente… Il fut étonné de ce que lui avait raconté le " Chef ". Sephiroth ? nul au combat ? Décidément, il devenait urgent d'aller questionner quelques élèves d'A-2…
        L'homme sortit de la salle des professeurs et traversa le couloir qui menait à la cantine. Il espérait y rencontrer un ou deux élèves de la classe qu'il cherchait… Deux minutes plus tard, il aperçut Morak. Le professeur s'approcha de lui et, voyant l'adolescent seul, entreprit de lui parler de ce qui se passait aux cours de combat.
        " Eh, Morak, dis-moi… pourquoi Sephiroth avait de telles blessures la dernière fois ?
- Quelles blessures ? il n'avait rien…
- Arrête, j'ai bien vu les cicatrices qu'il avait encore ! On en a même discuté…
- Je ne vois pas de quoi vous parlez, mentit l'adolescent.
- C'est ta peur d'Arawn qui t'empêche de me dire ce qu'il s'est passé ! ?
Le garçon sembla confus. Apparemment, Fujimi avait vu juste…
- Non, je… oh, et puis zut !… Arawn n'est jamais très doux avec nous, vous le savez bien…
- J'en ai entendu parler… mais je n'ai pas vu de blessures sur toi, sur les autres élèves ! Pourquoi Sephiroth en avait-il ?
- Parce que… le Chef le DETESTE. C'est même… bien plus que ça… je ne sais pas pourquoi…ils ont l'air de se connaître depuis longtemps, mais Sephiroth n'a jamais rien voulu nous dire là-dessus…
- Arawn m'a parlé tout à l'heure… il veut faire dispenser Sephiroth de combat. Il dit qu'il est tellement faible qu'il ralentit les autres.
- HEIN ? et vous l'avez cru ? Depuis le début de l'année, et même l'année dernière, Arawn s'arrangeait pour que Sephiroth se batte le moins possible, pour qu'il ne puisse pas évoluer… Vous n'avez jamais entendu parler de ce combat qu'il y a eu il y a quelques mois entre le Chef et lui ?
- Non… que s'est-il passé ?
Morak regarda autour de lui. Si Arawn apprenait qu'il avait raconté ça…il était mort. Mais il n'y avait personne dans le couloir.
- Le Chef a voulu engager un combat contre Sephiroth… je ne sais pas ce qui s'est passé, je crois qu'il avait triché et utilisé une matéria " Temps " pour paralyser son adversaire…Mais bon, il est arrivé un moment où le sort n'a plus fait effet…
- Mais… alors ?
- Sephiroth a sorti sa limite ! Elle était géante, superbe, j'ai jamais vu ça de ma vie ! Une immense vague d'âmes noires, brûlante comme la lave d'un volcan…Arawn se l'est pris en pleine tronche. VOOOFF ! ! ! ! ah ah, il en restait plus grand chose à la fin du combat. Mais des surveillants sont arrivés, ils ont soigné le Chef avec la magie… Après je sais pas ce qui s'est passé. On nous a ordonné de remonter dans nos chambres, et Sephiroth a été retenu là-bas…
- Tu ne sais pas ce qui a pu lui arriver ? Les blessures qu'il a…
- J'en ai une idée, mais… en fait, après cet incident… on a plus revu Sephiroth pendant au moins trois semaines… ensuite il est revenu. On l'a trouvé à notre retour de cours dans la chambre. Il n'a rien dit, même si on essayait d'en savoir plus sur ce qui lui était arrivé pendant tout ce temps. Mais on a vite compris quand on a vu toutes les cicatrices qu'il avait sur le torse…
- Ainsi c'était… Arawn qui le maltraitait comme ça ?
- Ne parlez pas au passé, monsieur. Hier encore il s'est fait tabasser. "
     Il y eut soudain un grand silence. Fujimi était choqué, même s'il s'attendait un peu à cette réponse. Il regarda l'adolescent à la peau sombre qui était devant lui. Qu'allait-il donc faire ? Arawn voudrait absolument la dispense de Sephiroth dès demain… Mais maintenant qu'il savait tout ce qu'avait dû endurer le jeune homme, il se demanda comment il allait se sortir de cette fichue situation. Pas question d'obéir à Arawn. Pourtant…
Des bruits de pas se firent entendre. Des pas lourds. Morak se retourna et vit Arawn qui arrivait, à l'autre bout du couloir.
       " Euh… je… balbutia l'adolescent.
- Merci Morak de m'avoir écouté ! dit bien fort Fujimi pour que le Chef, qui se rapprochait, entende la conversation. Et tâche de mieux te débrouiller en sport la prochaine fois ! après, tu t'étonnes d'avoir de mauvaises notes…
- Euh… oui monsieur ! je vais essayer de progresser ! répondit le jeune homme pour jouer le jeu.
- En voilà de bonnes résolutions ! j'espère que ce ne sont pas des paroles en l'air. "
Le professeur tenta de meubler la conversation jusqu'à ce qu'Arawn les eut dépassés et eut disparu dans un autre couloir. Evidemment, s'il était resté seul là, le Chef lui aurait sûrement parlé et voulu que Fujimi se dépêche de lui donner la dispense… Quand tout danger fut écarté, les deux personnes se séparèrent et allèrent chacune de leur côté.
        Fujimi se demanda bien ce qu'il allait faire. Mais qu'est-ce qu'il risquait ? Arawn ne pourrait pas le frapper comme il frappe ses élèves… Enfin, il espérait.

        De son côté, Morak arriva à l'étage où était sa chambre. Il allait y rentrer quand une main lui pris l'avant-bras. Stupéfait, l'adolescent se retourna.
        " Tu n'aurais pas dû… " fulmina Arawn.


*  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *

 

        L'immense escalier en spirale descendait jusque dans les profondeurs du souterrain, et presque plus aucune lumière ne filtrait. Les jeunes gens avaient eu du mal à trouver le passage secret, caché dans la plus grande des chambres du manoir. Mais ils étaient inquiets. Où était donc passée l'équipe 1 ? Ils avaient sûrement trouvé le passage avant eux et étaient descendus… mais qu'est-ce qui les attendait en bas ?
" Au moins, on sait qu'il va y avoir une porte à ouvrir avec la clé qu'il y avait dans le coffre. Et derrière la porte… un type des Turks modifié génétiquement par un savant fou…
- Ou un autre énorme monstre contre qui il va falloir encore sacrifier deux ou trois vies ? murmura le lieutenant avec rage. Non, j'avais dit de ne pas prendre de risques, et vous m'avez désobéi ! Vous ne referez pas deux fois la même erreur.
- Mais… soupira Intyre. Vous voulez dire qu'ils seraient morts pour rien ? Sauvons au moins une vie pour les trois que nous avons déjà perdues… "
Onuki soupira d'un air las. Non, ils ne seraient pas morts pour rien. Mais CETTE vie à sauver valait-elle vraiment la peine de prendre encore des risques, de peut-être faire tuer encore d'autres personnes ? Il verrait bien. Avec l'équipe 1, ils seraient plus forts, et tout irait mieux.
        Tout le monde descendit les escaliers et s'engagea dans un long couloir sombre. Il semblait fait de pierre, et les reflets violets de l'étrange minéral ne semblaient pas naturels. Des squelettes et des chaînes se trouvaient de part et d'autre du chemin. Le lieutenant s'approcha d'un des squelettes. Il était entièrement blanc, à part quelques taches rouges ça et là… tous les autres squelettes étaient pareils. Comme si ces gens avaient été tués récemment. Soudain, Gadjaya poussa un cri.
        " Là… il y a des armes cassées… des… pistolets…
- Tu es sûr ? s'étonna le lieutenant. Où ça ?
- Regardez, il y a des lambeaux d'habits, des…
- …UNIFORMES ?
- Oh non… l'uniforme réglementaire de l'escadron Ultima… et là, c'est bien l'Outsider du commandant Regan…
- Mais comment… ? On les a quittés il y a à peine quelques heures, et ce sont des squelettes !
- Apparemment il y a des monstres particulièrement zélés… intervint Kargin. Regardez ! "
Une créature cadavérique, que personne n'avait vue jusque là, était cachée dans un recoin d'ombre. Elle semblait… avoir deux têtes ! mais le bas du corps était unique… l'immonde animal était en train de dépecer un cadavre qu'il tenait entre ses mains hideuses… un cadavre d'adolescent… ! La vitesse et l'efficacité avec laquelle il faisait cette ignoble tâche était surprenante. La créature releva une de ses têtes et fixa le petit groupe.
" Yang… Ying-Yang… " laissa-t-elle échapper. Les jeunes gens, déjà horrifiés par la découverte des squelettes de leurs amis, ne purent s'empêcher de paniquer. Cette bête était un Ying-Yang ! Un monstre dont ils avaient déjà entendu parler, et qui n'était pas qu'un charognard… Les adolescents croyaient que les histoires qu'on leur avait raconté sur cette bête modifiée génétiquement avaient été inventées pour leur faire peur ! Mais maintenant…
        La créature délaissa le cadavre déchiqueté et se concentra sur les êtres VIVANTS qui se tenaient à quelques mètres d'elle. Décidément, c'était le jour ! Depuis quelques heures, dix déjeuners sur pattes étaient venus s'aventurer dans son antre. Voilà ce qui allait enfin combler sa gourmandise…
        " Lieutenant ! je… je n'ai vu que cinq squelettes humains, balbutia Gadjaya. L'équipe 1 était composée de six personnes… quelqu'un serait encore vivant ?
- Pas le temps de penser à ça pour l'instant ! cria Onuki. Il faudrait faire attention à nos vies d'abord ! Préparez-vous au combat, j'ai l'impression que ça ne va pas être du gâteau…
- Mais mon lieutenant, je n'ai plus d'arme ! s'exclama Intyre en regardant ses mains à nouveau intactes, guéries par la magie. Je ne vais pas me battre avec mes poings…
- Alors tiens, prends ça ! " dit l'officier en lui lançant son arme de rechange.
Intyre n'avait jamais vraiment essayé ce genre d'armes - un Pacificateur modifié-  mais il apprendrait à s'en servir pour l'occasion.
        Onuki arma son Lazura or et tira sur une des têtes du Ying-Yang. Il s'aperçut que chaque tête avait sa personnalité, et commandaient parfois chacune leur tour le corps qu'elles se partageaient. La balle toucha la tête bleue de Ying, qui poussa un hurlement de douleur. Il riposta en utilisant la magie de Glace.
        " Attention mon lieutenant ! lança Kargin. J'ai l'impression que Ying est fort en magie de Glace et Yang utilise plutôt la magie de Foudre.
- Tu as une matéria de protection ?
- Gadjaya en a une ! Il faudrait faire Blindage sur toute l'équipe ! tu pourrais ?
- Euh…oui, répondit la jeune fille. Si je la combine avec ma matéria " Tout "… "
Ce fut ce qu'elle fit. Mais Ying avait déjà lancé Glace2 sur Onuki, qui encaissa le coup. Quand le Blindage, c'est-à-dire la protection partielle contre la magie, fit effet sur toute l'équipe, l'horrible créature sembla réfléchir. Avec deux cerveaux, ses capacités mentales étaient décuplées… Elle choisit s'attaquer Kargin avec ses bras immenses. Il esquiva et se fit une joie de tirer dans la tête de Ying, qui avait osé attaquer son lieutenant. Du sang gicla et le monstre semblait furieux. Il se trémoussait dans tous les sens, le haut de son corps, trop lourd, semblant tomber en arrière, puis en avant… Mais les conditions de combat étaient difficiles pour les jeunes gens car, étant quatre, leur vitesse était réduite. Intyre tenta de tirer sur Yang, mais il rata sa cible. Il pensa invoquer Odin, mais il n'avait presque plus de points de magie, et sans ça, impossible d'utiliser la magie… les ethers pouvaient restaurer ces points, appelés MP, mais il n'en avait pas, et il doutait que les autres en aient pris avec eux.
        Onuki tira sur la tête de Yang, cette fois-ci. La tête rosâtre semblait développer une toute autre personnalité que sa compagne. A l'évidence, le moindre mouvement la rendait hors d'elle.
        " Elle a l'air toute excitée… méfions-nous ! lança Kargin. Mais… qu'est-ce qu'elle fout ? oh non… NOOOOONNNNN !!!!!!!!!!!! "
La créature se lança sur le lieutenant Gündoan, en un cri déchirant. Kargin reconnaissait cette attaque, on lui en avait déjà parlé… " Yang suicidaire " était l'attaque la plus destructrice du Ying-Yang !!!!
        Une énorme explosion eut lieu, et Intyre crut bien voir les chiffres magiques 9785 apparaîtrent lors de la déflagration. Les adolescents restèrent pétrifiés de terreur. Quand la fumée s'estompa, il ne restait plus rien du monstre et de leur lieutenant, à part quelques lambeaux de chair dispersés ça et là sur le sol rocheux.
        " NOOOOOOOOOONNNNNNNNNNNN !!!!!!! "
 Kargin tomba à genoux sur le sol, et éclata en sanglots. Tous… ils disparaissaient tous les uns après les autres…sans qu'ils puissent rien y faire… Maintenant ils n'étaient plus que trois, et ils n'allaient pas tenir longtemps si d'autres monstres arrivaient…
        " Kargin… nous… nous pourrions essayer de libérer le gars enfermé ici… il pourrait peut-être nous aider…
- On ne sait même pas… où il est, ce mec… soupira l'adolescent.
- Regarde, là. Cette porte de bois est fermée à clé. Il est sûrement là. Tu as la clé ? "
Kargin se leva péniblement et s'approcha de la porte en question. Il rentra la clé dans la serrure, et après quelques efforts, il réussit à la débloquer. La porte s'ouvrit dans un grincement lugubre, et les jeunes gens se dépêchèrent d'entrer. En cet endroit sombre, les monstres seraient sûrement moins nombreux. La panique envahit soudain Intyre.
" C'est quoi tous ces cercueils et ces crânes ? On dirait… un tableau de chasse, tellement c'est bien rangé…
- Beuh… je dirais plutôt un endroit où l'on a stocké tous les cadavres des gens sur lesquels le " Savant fou " a fait des expériences…
- Regardez, ce cercueil, au milieu… il a l'air plus grand que les autres…
- Hum ! si le gars était là-dedans, il ne doit plus rester qu'un squelette… "
Les adolescents essayèrent tant bien que mal d'ouvrir le cercueil. Bientôt, il céda, et  les jeunes gens découvrirent avec étonnement un homme, parfaitement bien conservé, tout habillé de rouge. Il semblait endormi… Gadjaya essuya une larme. Elle n'arrivait pas à réaliser tout ce qui venait de se passer. Onuki Gündoan, mort… tout comme Méjan, Soya, Fim, et toute l'équipe 1… non, peut-être pas toute. Il lui semblait bien qu'une personne avait réussi à s'échapper. La jeune fille avait aperçu une autre porte, au fond du couloir. Peut-être que le survivant s'était caché là-bas ?
        " Qui êtes-vous ? "
Les trois adolescents sursautèrent. C'était l'homme du cercueil qui avait parlé !
        " Je… nous sommes… des tireurs d'élite…
- La Shin-ra… partez, je n'ai plus rien à faire avec l'Organisation.
- Non, nous sommes venus vous demander de l'aide. Nous ne savons pas qui vous êtes, enfin, si… un ancien Turk… c'était écrit dans une lettre d'indices qui permettait de trouver la clé de cette salle… expliqua Intyre.
- Je ne pense pas pouvoir vous aider en quoi que ce soit. Je dois purger ma peine. J'ai péché… en dormant depuis maintenant… 16 ans, je tente d'expier ma faute.
- De quoi parlez-vous ? nous…
- Laissez-moi dormir. Ce ne sont pas vos affaires, fit l'homme en se recouchant.
- Myn et Mélléane auraient sûrement voulu que leur fils ne gâche pas sa vie ainsi, murmura Gadjaya.
A ces paroles, l'homme se dressa soudain.
- Comment… vous vous êtes renseignés sur moi ?
Int

yre et Kargin se demandèrent de quoi parlait Gadjaya.
- Non… répondit la jeune fille. J'ai senti… Vincent… que c'était vous… Dans le grand salon, en bas, j'ai eu une vision. Vos parents étaient là. Ils étaient heureux, ils parlaient au général Donos Repness.
- Donos Repness… Hum… son fils Phanan était colonel à la Shin-ra du temps où je travaillais pour l'Organisation…
- Vos parents disaient qu'ils attendaient un fils, et qu'il s'appellerait Vincent. Je ne sais pas pourquoi, mais dès l'instant où je vous ai vu, j'ai su que c'était vous, ce fils…
- Tu ne t'es pas trompée. Mais je dois continuer à dormir. Je ne peux pas faire autrement. Il y a 16 ans, j'ai échoué à la mission qui m'avait été confiée. Je n'ai pas pu… sauver celle que j'aimais…
- Un savant vous a modifié génétiquement. C'était écrit dans la lettre.
- …
- Vous devez nous aider, si vous savez vous battre. Pour venir jusqu'ici et pour trouver la clé pouvant vous libérer, tous nos amis sont morts… ça fait… neuf personnes…
- Mon péché n'en est que plus grand, maintenant, soupira Vincent.
- Sans une aide de votre part, nous mourrons nous aussi, et votre péché sera encore plus lourd, si vous voyez ça sous cet angle. Ne vous terrez pas dans ce cercueil.
- Ce n'est pas à vous de me dire ce que je dois faire ou non. Désormais, je ne me plierai plus à la volonté d'autrui… Avant, je ne me posais pas de questions, j'obéissais aux ordres, un point c'est tout. Et j'ai échoué.
- Tu ne supportes pas l'échec…
- Cet échec-là… aura des conséquences catastrophiques, j'en suis sûr.
- Vous étiez seul pour cette mission ?
Vincent mit un long moment avant de répondre.
- …oui.
- Alors c'est un peu normal si vous avez échoué, dit Kargin. Etre seul pour accomplir une mission, c'est pas évident. Nous, on était 13… on a pas réussi pour autant. Alors seul… vous ne devez pas vous en vouloir.
-   Non, il serait trop facile pour moi de vivre normalement sous prétexte que j'étais seul ! Par ma faute, qui sait ce qui arrivera ? J'accepte la douleur du sommeil éternel… pour expier.
- Pour réparer vos fautes, vous voulez rester là, dans ce cercueil…ça peut être un moyen… mais on ne peut plus rien réparer ensuite. La vraie réparation, pour moi… c'est combattre pour défendre le plus de monde possible. "
Vincent regarda les trois jeunes gens d'un air pensif. A l'évidence, il avait été touché par leurs paroles… L'homme poussa un long soupir. Expier en " réparant ". Après tout, ce n'était pas une mauvaise idée…
" Je viens avec vous. Je mettrais longtemps à réparer tout ce que j'ai fait. Peut-être n'y arriverais-je pas… mais au moins, je servirai sûrement plus à vous aider qu'en restant à moisir dans ce cercueil… "
Les adolescents furent heureux que Vincent Valentine se joigne à eux. Mais leur but maintenant était de ressortir sains et saufs du manoir… retrouver les " documents " de la Shin-ra ne rimerait plus à rien s'ils se faisaient tuer lors de leur retour. Peut-être même parviendraient-ils à sauver la personne survivante de l'équipe 1…
" Il y a une autre porte là-bas… dit Gadjaya aux autres. Si quelqu'un a survécu, il est sûrement parti se réfugier dans cet endroit.
- C'est le laboratoire… murmura Vincent.
- Allons-y. Il y a des monstres là-dedans ?
- Pas que je sache. "
Le petit groupe avança avec précaution dans le tunnel de pierre, jusqu'à arriver à la porte du laboratoire, qu'ils ouvrirent sans difficulté. A l'intérieur, tout était sombre. Quelques lumières brillaient faiblement, et l'atmosphère inquiétante ne rassura pas les jeunes gens. Soudain, Kargin perçut du mouvement derrière une grande pile de livres.
        " Un monstre ou un survivant ? demanda Intyre.
- S'il te répond c'est un survivant, s'il se jette sur toi c'est un monstre…
- Et s'il se jette sur moi et que c'est un survivant ?
- Un monstre survivant ?
- Oh, taisez-vous, les garçons !!! cria Gadjaya. Regardez ! "
Derrière le petit monticule apparut une jeune fille brune. Ses cheveux longs et raides étaient collés à ses épaules par le sang et la sueur. Elle avait l'air légèrement blessée, et son regard dur s'arrêta sur chaque membre du petit groupe.
        " Qui es-tu ? lui demanda Gadjaya.
- On s'en fout. J'aimerais juste savoir ce qu'il a pris à l'équipe 2 d'arriver si tard.
- On a eu pas mal de problèmes, répondit Gadjaya d'un ton tout aussi froid. On est les seuls survivants de notre équipe.
L'étrange jeune fille regarda Vincent Valentine.
- Qui c'est, lui ?
- Quelqu'un qui va nous aider à sortir sains et saufs du manoir. Allez, viens…
- Vous n'avez pas de matéria de régénération ? j'en aurais besoin. "
Kargin utilisa la magie sur la jeune fille, et les blessures se refermèrent aussitôt.
" Tu t'es sauvée du combat pendant que les autres se faisaient massacrer, c'est ça ? " lui lança Gadjaya. Elle reçut une claque retentissante.
" Tu n'as pas le droit de dire ça, espèce de…
- Eh, du calme ! intervint Intyre. C'est vraiment pas le moment de…
- Oh, toi, la ferme ! cracha la jeune brune. Le commandant m'avait dit de fouiller cette salle pour trouver les documents pendant qu'ils monteraient la garde ! Quand je suis revenue… "   Elle éclata en sanglots. L'aspect froid et insensible qu'elle avait voulu se donner par fierté était tombé d'un coup, au souvenir de tous les amis qu'elle avait perdus lors de cette mission.
Gadjaya se releva. " Je suis désolée, je… je ne voulais pas dire ça… " Kargin s'accroupit aux côtés de la jeune fille en pleurs.
        " Comment t'appelles-tu… alors ? " Elle essuya ses larmes et se releva. " Véga Cyneese "
        Intyre se tourna vers Vincent qui regardait la scène sans rien dire.
" Tu crois que tu seras capable de nous protéger ?
- J'étais un Turk, avant. Vous avez échoué la mission car vous n'êtes que des débutants. Même des soldats confirmés auraient eu du mal à l'accomplir.
- Tu ne réponds pas à ma question…
- Si. Un Turk n'est pas une mauviette. Je saurais me battre comme il le faut. Mais je voulais attirer  ton attention sur le but de cette mission…
- Que veux-tu dire ? demanda Véga. On l'a réussie. J'ai trouvé les documents. Seul le commandant Regan était au courant de leur nature précise, mais il m'a révélé tout ça pour que j'aille les trouver dans la bibliothèque du laboratoire.
- Je connais bien toutes les petites façons de faire de la Shin-ra. Ils s'étaient renseignés auparavant de tous les risques de la mission. Et ils ont envoyé des débutants, malgré le danger. Pour être sûrs de récupérer ces " précieux documents ", tu ne penses pas qu'ils auraient plutôt envoyé un escadron qualifié ? ils ne manquent pas à la Shin-ra…
- Où veux-tu en venir ?…
- Ces documents, ils s'en foutent complètement.
- QUOI ???
- Ils vous ont envoyés ici pour vous tester. Plein de jeunes veulent rentrer dans les rangs de l'Organisation. Pour montrer que la Shin-ra est juste et tolérante, ils acceptent quasiment tout le monde… Mais tout le monde n'est pas fort. Alors… il  faut faire le tri.
- NON ! Non, c'est impossible !… s'exclamèrent les adolescents.
- Les faibles n'ont pas leur chance dans ce monde. Seuls les plus forts survivent et peuvent continuer à se battre pour la Shin-ra. Pour eux, les autres sont des poids morts. Des bouches à nourrir pour rien, à ravitailler pour rien… des armes inutiles et encombrantes, en quelque sorte. Et les gens ne s'aperçoivent pas qu'on leur ment. Ils croient que leurs enfants sont morts en héros lors d'une mission, comme disent les médias.

Mais… la réalité est tout autre… ."

 

 

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