Fan fiction

 

Evolvana

 

Chapitre 2 : Nouvelle vie


                  
               A présent, une pluie diluvienne s’abattait sur les pavés de Kalm. C’était une journée presque banale d’hiver... à l’exception d’une chose : ce jour-là... ça faisait exactement six ans que Sephiroth avait fait son choix, et qu’il avait quitté Midgar. Il se demandait bien comment les dieux avaient pu faire, mais ils lui avaient certifié que ni Hojo, ni Gast, ni le président Shin-ra ne se souvenaient de lui. Il lui fallait oublier sa « vie antérieure », mais un passé si douloureux ne peut être oublié facilement... tout comme les blessures tourmentant chaque nuit un enfant, le réveillant en sursaut, submergé par l’angoisse que ses anciennes peurs reviennent miner son existence.
                     Sephiroth détourna la tête du spectacle monotone de la pluie, pour se retrouver nez à nez  avec Minuki, la fille de ses parents adoptifs, qu’il considérait à présent comme sa sœur. L’adaptation à sa nouvelle vie avait été dure, mais après six ans il considérait qu’il faisait partie de la famille.
« Sephi ! Il est l’heure de manger... Maman m’a envoyée te prévenir.
- Ouais, merci. J’arrive.
- Sale temps, hein ? à ce rythme là Kalm va être engloutie... ça serait bête, Papa nous avait promis d’aller quelque pa...
- Chuuut !... tais-toi, la coupa juste à temps Frey, son frère.
- Oups ! oui, excuse-moi... lui répondit Minuki.
           Sephiroth les regarda tour à tour, l’air faussement soupçonneux. « Me cacherait-on quelque chose ?
- Bah ! fit la jeune fille en prenant un air malicieux. Tu le sauras bientôt... »
             Les trois adolescents descendirent les escaliers comme des fous, riant et se bousculant, ce qui leur attira d’ailleurs les réprimandes de leur mère...

             Quand toute la famille fut réunie autour du repas, Jeff, en bon chef de famille, entama un petit discours à l’attention de ses enfants : « Alors je pensais, comme nous n’avons pas eu très beau temps pour nos grandes vacances, que nous allions tout de même profiter des quelques jours qui nous restent... Je me disais...hum...
- Allez, ne les fais pas languir plus longtemps... le coupa Hestia, sa femme, d’une voix douce mais décidée.
- Bien, bien... alors, les jeunes, que dites-vous d’aller au Gold Saucer ? »
      Les trois concernés se regardèrent, un grand sourire aux lèvres. « La question ne se pose même pas... dit Minuki. Mais dis-moi... ce n’est pas donné, non, l’entrée à ce parc d’attractions...
- Hé bien...c’est vrai, mais nous avons économisé pour pouvoir nous le permettre... vu que nous ne sommes pas partis en voyage, à cause du temps, nous n’avons pas fait de dépenses inutiles... expliqua Jeff en jetant un regard à sa femme.
- Hé ! dit-elle, indignée. Je te rappelle que ce n’est pas moi qui ai voulu acheter une matéria « foudre » à deux mille gils, à Costa del Sol !
- Quoi ? Tu as acheté..... ? à ce prix là ? s’étonna Sephiroth. Tu t’es vraiment fait arnaquer... »
     A cette remarque, le père devint rouge de fureur, comme pris d’hystérie. Le garçon ne l’avait jamais vu dans cet état auparavant. Il ne comprenait pas pourquoi son père adoptif réagissait comme cela à une simple remarque. En temps normal, il l’aurait pris en plaisantant, suggérant que ses enfants auraient dû faire les courses à sa place... mais là, c’en était vraiment autrement.
« QUE ? COMMENT OSES-TU ?Je ne t’ai pas élevé comme ça pourtant ! ! ! Quel insolent ! Tu me déçois vraiment, Sephiroth ! ! ! !
- Mais... papa...
- TAIS-TOI ! ! ! File dans ta chambre ! tu seras privé de dîner ! ! !
- MAIS...Qu’est-ce qu’il te prend, chéri ! s’affola Hestia. Pourquoi te mets-tu dans cet état ?
- SEPHIROTH, monte dans ta chambre ! TOUT DE SUITE ! »  hurla le père, fou de rage.
      L’adolescent leva ses beaux yeux verts pour les plonger dans ceux de l’homme en face de lui... le calme impénétrable de l’un faisait offense à la fureur indicible de l’autre. La main se leva, prête à frapper. Sephiroth resta immobile, ne cherchant pas à éviter la gifle monumentale qu’il allait recevoir.
           Mais rien ne se passa. Minuki et Frey, terrorisés par cette soudaine montée de colère, se trouvaient encore blottis dans un coin du salon, tandis que leur mère était au bord des larmes, encore assise sur sa chaise, n’ayant pas eu le courage de bouger. La main se baissa, et le père soupira, comme pris d’un profonde lassitude.
« Désolé... excuse-moi, Sephiroth. Je...je ne sais pas ce qui m’a pris... enfin si, mais...ce n’est pas de ta faute... » L’homme s’affaissa dans un fauteuil. A le voir ainsi, il paraissait au moins dix ans de plus. Sa femme s’approcha de lui et pris sa main dans la sienne, en signe de réconfort. « Hestia... je n’en peux plus... pourquoi ? pourquoi ne pas prendre le chemin le plus facile, au lieu de prendre je ne sais quel détour qui ne me semble mener à rien ? Le marché devient de plus en plus impossible...
- Ecoute, chéri... sois raisonnable, d’accord ? nous ne pouvons pas nous soustraire à notre tâche... et puis, son avis va peut-être changer, hein ? Ne perds pas espoir... » Elle se releva, et se rendit compte que ses enfants étaient toujours là. Elle parut gênée, puis dit d’un ton presque inaudible : « Allez, venez tous vous asseoir. Il est temps de manger. »
            Le dîner se déroula dans un silence glacial. L’incompréhension régnait chez Frey et sa sœur, qui se demandaient bien quel était ce problème dont parlaient leurs parents. En tout cas, ça avait l’air grave pour que leur père se mette dans un état pareil... lui qui, à leur connaissance, ne s’était jamais mis en colère ! Sephiroth, quant à lui, savait déjà à quoi s’en tenir. C’était ça. Oui, ça ne pouvait être que ça... et dans ce cas, il s’étonnait que Jeff n’ait pas cherché à lui en parler. Il ignorait sûrement la maturité d’esprit de son fils adoptif. Après tout, les dieux avaient certainement caché beaucoup de choses à ceux qu’ils avaient choisis pour garder et élever leur protégé, ne leur révélant que le strict nécessaire.
Et ce que l’adolescent avait prévu arriva.
« Heu...Sephiroth...il faudra que l’on parle, tous les deux...d’accord ? » dit Jeff quand le repas fut terminé. L’intéressé acquiesça, puis attendit que le reste de la famille parte se coucher. Le père sourit à l’approche de son fils adoptif, mais Sephiroth se demanda si c’était plus pour se faire pardonner que pour le mettre à l’aise. Jeff ouvrit la bouche pour s’apprêter à parler, mais la referma à la vue de l’infinie tristesse qu’il lisait maintenant dans les yeux de l’adolescent. « Papa, je sais que tout est de ma faute. Je n’ai jamais causé que des problèmes...
- Ne dis pas ça, ce n’est pas toi... rien est de ta faute, tu le sais bien. C’est juste...que ton étrange protecteur nous a rendu visite il n’y a pas si longtemps. Il porte toujours une sorte de manteau noir, avec une capuche qui lui recouvre entièrement le visage... il ne vient jamais prendre de tes nouvelles, il a l’air de toujours savoir tout...
- Il s’arrange pour vous voir pendant que je ne suis pas là, hein ? je n’ai jamais vu une telle personne.
- Oui, tu as raison... mais c’est pourtant lui qui t’as amené ici pour la première fois...tu ne t’en souviens pas ?
- Non... mes souvenirs de cette époque-là sont un peu confus... par contre je me rappelle tout ce qui s’est passé avant et après. Comme si on avait... effacé cela de ma mémoire... » Sephiroth resta soudain silencieux. Il venait de comprendre ce que les dieux avaient VRAIMENT voulu faire...

« Pourquoi es-tu si blême, tout à coup ? demanda Jeff, inquiet.
- Heu...c’est rien, P’pa. Continues.
- Hum...tu es sûr ? bon. Tu vois...ta mère et moi ne roulons pas sur l’or...pourtant, nous arrivons à vous élever sans trop de mal... Mais... ce serait si simple de combattre pour gagner de l’argent...alors je me suis dit, alors que l’on passait devant un magasin de matéria à Costa del Sol...
- Je vois. »
      Sephiroth avait déjà compris tout ça. Et c’était bien ce que les dieux attendaient de lui à présent. De REFUSER l’offre pourtant si tentante de son père, c’est-à-dire ne pas  combattre. Voilà pourquoi les dieux avaient envoyé un messager à ses parents adoptifs...non pas pour veiller sur lui, mais pour surveiller s’il ne lui prenait pas l’idée de rejoindre son destin initial. Dévoiler ses capacités au monde serait-il un désastre pour les dieux ? Mais pourquoi... peut-être que la Shin-ra le remarquerait et voudrait l’enrôler... dans ce cas tout recommencerait. Mais... quelque chose dans cette histoire le troublait, il ne savait pas pourquoi.
      « Tu... vois ? comment... ton protecteur t’en avait parlé ? s’étonna Jeff. Pourtant, il me semble bien que tu ne l’as jamais rencontré...non ? c’est toi qui me l’as dit...
- Je sais. Je voudrais savoir...ce qu’il t’a dit sur moi.
- Je ne peux pas, Sephiroth. Il m’a interdit de t’en parler. Désolé...
- Tu ne comprends pas ou quoi ? Je DOIS savoir ! Tu ne t’es jamais demandé pourquoi il ne voulait pas que je combatte ? Ni d’où je venais réellement ? Mes cheveux, mes yeux...
- Eh bien quoi, tes cheveux, tes yeux... ils sont normaux... répliqua son père tout naturellement.
- Quoi ? tu as déjà vu beaucoup d’adolescents qui ont naturellement des cheveux blancs argentés, et des yeux comme les miens ? Cette couleur... »
          Jeff parut troublé. Il n’avait pas l’air de comprendre le sens des paroles de son fils adoptif. A l’évidence, il ne s’était jamais posé la question.
«  Mais... que dis-tu... tes yeux et tes cheveux ne sont pas plus étranges que les miens... au contraire, ça fait très...classe. Beaucoup de gens doivent t’envier. »
   A ce moment, Sephiroth réalisa que les dieux avaient bien pu faire paraître ces détails physiques comme « normaux » aux yeux du reste du monde... qui sait ? leurs pouvoirs sont infinis... Mais jusqu'à quel point étaient-ils manipulés, eux, mortels ? Quelle était la vérité ? Et ce terrible futur dont même les dieux avaient peur... Et quel était son rôle dans tout ça ? Tant de questions qui le tourmentaient...
   « Bon, passons, marmonna-t-il. T’a-t-il dit pourquoi il n’était pas d’accord avec ton projet ?...
- Hum... peu après avoir acheté la matéria, ta mère et moi avons pris le chemin du retour, par le bateau... et il était là. Il est venu à notre rencontre et nous a demandé si ce que nous avions acheté était pour toi. J’ai acquiescé, et il m’a dit que ce n’était pas une bonne idée que de vouloir te faire combattre... et qu’il s’y opposait catégoriquement. Nous n’avons pas voulu insister... Quand j’y pense, quel gâchis...aussi bien d’argent, de temps que de tes talents... je suis sûr que tu en as. Tu es costaud pour ton âge, et tu n’as pas froid aux yeux.
- Si ça  peut vous aider, je veux bien me battre, répondit Sephiroth, plein d’espoir. Je suis sûr que ça me plaira...
- J’en serais ravi, mais... c’est dangereux...et puis...ton protecteur...
- Bah...on verra bien... au fait, elle est où cette matéria ? j’aimerais bien l’examiner... »
             
               Jeff sortit d’un tiroir une petite boîte ornementée, et la tendit à l’adolescent, avec une certaine appréhension. « Prends-en soin. »
                                                  


*  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *

              La vaste plaine verte s’étendait à perte de vue, et un vent doux soufflait sur son visage. Au loin, il y avait la forme sombre de Midgar... le ciel prenait une autre teinte au-dessus de la ville, comme si elle faisait partie d’un autre monde...plus obscur, plus violent, et surtout plus impitoyable... il ne préférait pas y penser. Même la terre devenait sèche et rocailleuse à mesure que l’on s’approchait de la citée... Il détourna la tête de ce triste spectacle et examina le katana qu’il avait gardé avec lui depuis son départ, six ans auparavant. Il avait pris soin de prendre la matéria « foudre » que son père lui avait confiée... et chercha un quelconque ennemi contre qui se battre.
                      Sephiroth ne marchait que depuis deux minutes lorsqu’il entendit un vrombissement derrière lui. Il eut juste le temps de se retourner pour voir apparaître deux Desperados, des brigands cruels et stupides qui sillonnaient des plaines de Kalm. Les gens en avaient peur, et les surnommaient même les « Ballades de démon »...
     « Alors petit, on se promène tout seul, comme ça, hors de chez soi ? Hin hin hin... ricana le premier motard.
- Tu cherches un peu d’action, pas vrai ? renchérit le deuxième, son corps ballottant nerveusement de gauche à droite, décharné et déformé par les longues années passées sur sa machine. Nous, on aime se battre, piller, tout casser et défoncer la tête des petits morveux de ton genre...
- Ouais, c’est bon, pas la peine d’en faire un plat ! trancha Sephiroth, moqueur. Vous voulez vous battre contre moi, quoi... »
       L’air cramoisi des motards à cette remarque fit sourire l’adolescent.
«  Et il se moque de nous en plus ... »
   Le premier Desperados fonça sur le jeune guerrier en hurlant de rage, bien décidé à tuer.
« Raté vieux Levrikon ! » cria Sephiroth à l’adresse de son assaillant, tout en esquivant le coup. Cette dernière insulte eut l’effet d’une bombe.
« QUOI ? ! ? ! DE QUOI M’AS-TU TRAITE PETIT #%§ !*¤ ! ? ? » vociféra le brigand. Il est vrai que la comparaison n’était pas très flatteuse : un Levrikon étant une espèce d’autruche stupide vivant dans la Région des prairies, dotée d’une vue particulièrement exécrable, et qui, de plus, sentait incroyablement mauvais.  
         D’un revers de katana, l’adolescent trancha la partie inférieure du moteur de la première moto. L’essence se répandit en une traînée noire sur le sol, avant que l’engin ne se transforme en une boule de feu, envoyant des morceaux de son propriétaire aux quatre coins de la plaine. Le deuxième bandit, au lieu de prendre la fuite, s’apprêta à foncer sur Sephiroth, quand un énorme éclair s’abattit sur lui, le pulvérisant d’un coup.
          « Pas mal, cette matéria... ça ne m’étonne pas que Papa l’ait payée si cher, c’est une matéria Foudre 2, deux fois plus puissante qu’une matéria normale... » L’adolescent recueillit l’argent et l’éther laissés par les Desperados, puis regarda les deux cadavres fumants... ou plutôt ce qu’il en restait. « De toute façon, je n’ai pas à avoir de regrets pour ces deux-là, pensa-t-il. Ils voulaient me tuer, et je me suis défendu. Et puis... ils ont sûrement tué des centaines d’innocents rien que pour les détrousser... ils le payent aujourd’hui. »
        Il se détourna du macabre spectacle, et s’en alla en quête d’autres batailles, laissant derrière lui l’herbe verte de la plaine de Kalm... souillée à présent de sang humain qu’avait pour la première fois fait verser ce garçon, dont même les dieux n’osaient évoquer le nom sans une certaine angoisse...  

 

*  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *  

            Le visage d’Hestia prit une expression tellement effarée quand elle vit rentrer son fils que celui-ci se demanda s’il n’avait pas été victime d’une farce des dieux.
      « Oh, Sephi ! ! ! Tu as du sang partout sur tes habits et sur ton visage ! ! !... allez, il faut laver tout  ça ! Viens !...
- Maman... répliqua Sephiroth d’un air gêné. Je sais le faire tout seul... »
Le regard perdu de sa mère lui indiqua qu’elle se rendait subitement compte que ses enfants avaient grandi, mais que son attitude envers eux n’avait toujours pas changé.
« Je suis désolée... »dit-elle simplement. « Mais je n’aime pas trop l’idée de ton père... tu t’exposes à de tels dangers pour te battre que j’ai peur qu’un soir tu ne rentres pas...
- Ne t’inquiète pas pour moi. Je sais ce que je fais.
- Mais tu ne peux pas me demander de ne pas m’inquiéter ! tu es mon fils... »
       Soudain, on frappa à la porte. Hestia s’essuya les mains à son tablier et se dirigea dans le hall pour aller ouvrir .  « C’est lui. »dit simplement Sephiroth avant que sa mère ne tourne la poignée. Elle le regarda, surprise, puis se résolut à ouvrir la porte.
 « Euh...oh ! c’est vous... balbutia Hestia, en s’effaçant pour laisser passer le Protecteur.
- Je voudrais parler à Sephiroth... seul à seul.
- Oui, oui, bien sûr... Sephiroth ? appela-t-elle. Il y a quelqu’un pour toi...
- Je sais. »
         L’adolescent jeta un regard noir à l’être encapuchonné qui se tenait en face de lui, avant de le suivre dehors. Quand ils furent sûrs que personne ne pouvait ni les voir, ni les entendre, ils s’arrêtèrent. Le protecteur enleva sa capuche, et Sephiroth fut étonné de découvrir de qui il s’agissait. L’homme portait de longues moustaches et une grande barbe d’un blanc immaculé.
« - Le Père Noël ! s’exclama l’adolescent, tordu de rire.
- Petit insolent ! gronda Ramuh, le dieu de la foudre. Comment oses-tu ?
- Ah ah ah... les dieux sont lassants, ils ne rient jamais. J’aimerais pas être dieu.
- Tu ne pourrais pas en devenir un ! trancha le vieil homme, d’un air paniqué.
- Allez, je ne voulais pas te vexer, ironisa Sephiroth.
- Je ne te permet pas de me tutoyer ! Un mortel doit du respect aux dieux. Mais je suis venu ici pour régler un autre problème...
- Je vois. Je me suis battu, c’est ça ?
- Précisément.
- Et c’est interdit ? répliqua-t-il d’un ton innocent.
        Apparemment Ramuh n’était pas préparé à une telle réponse.
- N...non, mais nous voulons te rappeler...ta décision... ton nouveau destin doit être le plus éloigné du combat possible. C’est bien compris ?
- Mais pourquoi ? ne vous inquiétez pas, j’ai bien compris que ce n’est pas à ma vie que vous tenez. Vous vous fichez bien que je sois heureux ou non...
- Hum...ne dis pas ça, voyons... répondit le dieu, gêné.
- Si ! Je ne sais pas ce qui vous fait peur, dans le futur. Mais ça a un rapport avec moi. Je suis gênant, hein ? Je risque de compromettre votre petite sécurité ? »
     Le vieil homme se retint de lui donner une gifle. Il avait horreur qu’on lui parle de cette façon. Mais il dut bien avouer que l’adolescent n’était pas une menace pour rien... à quatorze ans, il avait la maturité d’un adulte, et comprenait bien des choses qu’un mortel ordinaire aurait qualifiées d’incompréhensibles.
      « Ce n’est pas ça... se décida enfin à dire le dieu. L’avenir du monde est en jeu ! Je ne peux pas t’en dire beaucoup plus... A cause de la Shin-ra et des expériences que les scientifiques auraient continué à faire sur toi, tu serais devenu surpuissant...et, galvanisé par ton désir de vengeance, la folie se serait emparée de toi et ta soif de destruction se serait éveillée... Tu comprends bien que nous voulons éviter ce massacre...
- Je connais mes limites. Mais... pourquoi vous, les dieux, n’avez pas tenté de m’éliminer dans le futur ?...
- Ce n’est pas si simple... soupira Ramuh, en voyant le regard si innocent du garçon...

*  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *
La jeune Ninsun regarda dans le miroir légendaire... et ce qu’elle vit la laissa bouche bée.
      C’était l’intérieur d’un temple. Un homme se tenait ,seul, en face de l’autel. Il avait une carrure d’athlète, de longues jambes musclées et de longs cheveux d’un blanc argenté... Apparemment, il venait d’y avoir une bataille. Un énorme dragon gisait sur le sol, une lame masamune plantée dans le cœur. L’homme, quant à lui, avait les habits déchirés, et l’on pouvait apercevoir des filets de sang coulant de ses blessures. Mais le plus frappant était son incroyable beauté. La jeune fille n’avait jamais vu ça de sa vie. Ses yeux exprimaient tant de choses à la fois... la volonté, l’assurance, le courage, le mépris... mais elle put aussi déceler une infinie tristesse, qu’il avait l’air de vouloir masquer sous ses expressions froides et distantes...
       Elle se demanda qui cela pouvait bien être... que reflétait ce miroir ? le passé, le présent ? ou même le futur ? et puis, ça pouvait bien être une illusion... Ninsun ne devait pas se trouver là où elle était. La sorcière de la montagne Gaea était absente, et la jeune fille en avait profité pour se glisser dans son antre. Elle était venue avec son oncle Laocoon, un aventurier chasseur de trésors, qui avait accepté de l’emmener dans une de ses expéditions... mais à une condition : pendant le voyage, elle devait trouver au moins un trésor de valeur !  C’est pourquoi elle était là, cherchant dans les affaires de la mystérieuse femme un objet susceptible de l’intéresser... et c’est là que son regard tomba sur une petite sphère aux reflets rouges... une matéria ! L’adolescente n’en avait jamais vu de pareille. Elle la prit délicatement dans sa main et s’apprêta à sortir, quand son oncle lui cria : « Hé, Nin ! Dépêche-toi, la sorcière risque de revenir d’ici peu ! »
- Ouais, j’arrive ! » dit-elle en regardant une dernière fois l’intérieur de la caverne. Le petit miroir décoré attira son attention. Peut-être devrais-je prendre celui-là ? se dit-elle. La mystérieuse personne qu’elle y avait vue l’intriguait beaucoup... et elle voulait en savoir plus... Elle prit le petit miroir et courut vers la sortie. Elle avait aussi réussi à voler un ether, substance permettant d’utiliser la magie. Mais tout à coup se dressa devant elle une grande femme, qui lui bloqua le passage. Ninsun sursauta.
   « Alors petite garce, on essaie de me voler ? Oh ! mon miroir des légendes ! Rends-moi ça, ou tu vas le regretter ! » Alors la jeune fille eut une idée. Puisqu’elle avait de l’ether, elle pouvait utiliser la matéria rouge... elle espérait seulement qu’elle était assez puissante pour terrasser la sorcière ! Alors un mot lui vint subitement à la mémoire... Alexander...
«  ALEXANDER ! ! ! ! » cria-t-elle. Soudain, des boules transparentes ainsi que des signes étranges se formèrent autour d’elle, puis se dispersèrent. Il lui sembla qu’elle aussi devenait invisible... Le sol commença à bouger : on eût dit un tremblement de terre, puis brusquement le sol s’affaissa entre son ennemi et elle. Un large gouffre se forma, d’où sortit, à la grande stupéfaction de l’adolescente, une énorme créature, qui semblait être un chevalier géant. L’étrange être se positionna et son heaume s’abaissa. Puis un laser mauve traça un motif sur le sol avant de s’abattre sur la sorcière.
« Eliminée » se réjouit Ninsun, encore quelque peu effrayée par l’action qu’elle venait de faire. Elle se précipita vers le scooter des neiges de Laocoon avec son butin, et sauta sur la machine.  « Mais c’était quoi tout ce bruit ? J’ai vu la sorcière revenir, mais je n’ai pas pu te prévenir à temps...
- Regarde ce que j’ai trouvé ! dit-elle en montrant à son oncle la matéria Alexander. C’est une matéria d’invocation ! J’ai invoqué Alexandre le Grand ! ! !
- Alors c’était ça ? ! Bravo, tu tiens ta promesse, tu as trouvé un sacré trésor, petite.
- Mais... j’aimerais la garder... je peux ? Tu comprends, si on est attaqués...
- OK, OK... mais fait attention ! Il faut que tu t’en serve à bon escient. En tout cas, niveau aventure, c’est fini pour aujourd’hui. On retourne à Icicle...
- Déjà ?... au moins j’ai ça ! se consola-t-elle en regardant le miroir, à présent gris et terne.
- Hé ! où est-ce que t’as trouvé ça ? on pourrait en tirer un bon prix à la foire de Kalm...
- Oh ! ça suffit, pas question ! c’est à moi, je le vends pas...
- Mais comment veux-tu devenir une bonne chasseuse de trésors si tu gardes tout ce que trouves ? Ah les filles...  
*  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *  *

            Toute la famille Hokorima était réunie devant la télévision, dans le salon. Kalm était en fête, la foire annuelle venait de commencer... celle-ci attirait des milliers de visiteurs du monde entier, aussi bien de Mideel que d’Icicle, la ville des neiges. Mais la Shin-ra diffusait sur les ondes nationales un reportage inédit traitant des mouvements rebelles écrasés vaillament par la toute-puissante organisation. A la une, ils montraient un jeune guerrier roux qui paraît-il avait réussi à vaincre à lui seul la majeure partie des centres rebelles. Le présentateur commença :
«  Voici Ruadan, notre jeune héros qui combat pour la gloire de la Shin-ra. Sa force est immense, ainsi que son esprit tactique... bien qu’il n’aie que seize ans ! Sachez que la Shin-ra recrute, et si vous, jeunes gens, voulez obtenir gloire et puissance, engagez-vous ! La Shin-ra protégera votre famille des monstres, vous aurez de bons revenus, et surtout... vous vous battrez pour la gloire de l’organisation qui peut sauver la planète de la pauvreté et des créatures du mal ! Donc n’hésitez pas, nous... »
   Sephiroth coupa le son. Il en avait assez. Quoi ? ils avaient trouvé quelqu’un pour le remplacer... avait-il subi les mêmes choses que lui ? non, ce n’était que de la propagande... et puis, quand il était encore à Midgar, Sephiroth n’avait jamais entendu parler d’une autre expérience sur un garçon plus âgé que lui... mais il y avait tant de choses qu’il ignorait... qu’on lui cachait...
«  Eh, Sephi ! Remet le son, je veux entendre ça ! se plaignit sa sœur.
- Bon, bon... dit-il en montant le volume à contrecoeur.
- Ouaah, qu’il est beau ce Ruadan... » lâcha Minuki devant l’image du jeune rouquin.
    « Une vraie horreur » pensa Sephiroth, un peu jaloux. « Il fait grand adolescent boutonneux, la Shin-ra aurait pu trouver mieux...je me sens un peu insulté qu’ils n’aient trouvé que ça comme remplaçant... » Mais il stoppa net ses réflexions quand il entendit les paroles du présentateur :
«  Notre jeune prodige viendra parader dans la ville de Kalm ; et y restera quelques jours avec sa troupe à l’occasion de la grande fête de la ville ! Comme on nous indique une effusion de loups sauvages dans cette région, la Shin-ra fera bien entendu son devoir et vous protégera des attaques de ces monstres sanguinaires... »
     Sephiroth était dégoûté de tant de mensonges... il regarda tout autour de lui, et s’aperçut que les autres étaient « hypnotisés » par les images et les paroles qui sortaient du poste de télévision. Mais quoi ? ils n’étaient pas capables de distinguer le vrai du faux... des esprits faibles... c’était ça, la Shin-ra s’emparait des esprits faibles en leur promettant des choses qui n’étaient que des mirages... mais quelqu’un habitué au désert se méfie des mirages ; quelqu’un pour qui la vie n’est emplie que de mensonges et de secrets ne se fait plus prendre à ces pièges... il apprend à les côtoyer et à les éviter tous les jours. Au fond de lui ces années passées avec la Shin-ra l’avaient forgé ; il savait à quoi s’attendre de leur part, il connaissait la nature perfide de son ennemi...
   « Hé, vous y croyez, vous ? sortit l’adolescent à ses parents.
- Eh bien, si la Shin-ra nous offre sa protection, ce n’est pas de refus... lui répondit Jeff.
- Mais nous n’avons pas besoin de leur prétendue protection ! rétorqua Sephiroth. Pourquoi croyez-vous qu’ils fassent ça ? pour le plaisir ?
- Mais c’est pour obtenir notre soutien...
- C’est ça, ils n’en ont pas besoin de notre soutien... ils sont nombreux et bien armés ; ils n’ont rien à craindre de nous. S’ils le veulent, ils peuvent prendre d’assaut la ville sans essuyer la moindre perte... en fait ce qu’ils font, là... c’est nous SURVEILLER. Ils s’installent dans la ville ; ils disent nous protéger de monstres imaginaires, mais personne n’a compris ce qu’ils ont réellement fait : ils tiennent la ville sous leur contrôle.
- Allez, quel pessimiste ! tu vois des menaces partout... allons plutôt accueillir les soldats qui viennent d’arriver en ville... suggéra Hestia.
- Quoi ? Ruadan est à Kalm ? ! s’exclama Minuki. Venez, Frey, Sephi, on y va ! ! ! »
      Sephiroth se désola de tant de naïveté. Il suivit toutefois sa sœur et son frère, se demandant bien quelle attitude allait adopter ce jeune prétentieux qu’il haïssait déjà...
              La ville était emplie d’une foule bruyante et remuante, acclamant les soldats habillés de bleu qui paradaient sur la place. A leur tête, un homme assez âgé qui semblait être un capitaine, et à sa droite un jeune homme habillé d’un costume vert foncé et orange. Ce devait sûrement être Ruadan. Le capitaine teint un petit discours ventant les mérites de la Shin-ra, puis présenta à la foule l’adolescent à côté de lui. Des acclamations et des cris fusèrent de partout, puis la troupe se dispersa. Certains partirent monter la garde, d’autres se dirigeaient vers les boutiques ou les hôtels. Tout à coup, Minuki prit la main de Sephiroth et l’entraîna près du groupe qui se formait autour du jeune rouquin. Sephiroth l’imaginait modeste et un peu timide, mais il n’en était rien.  
  «  Oh, c’est vraiment toi Ruadan ? Waouh...
- Eh ouais, je peux vous raconter mes aventures, si vous voulez... tout particulièrement la fois où j’ai sauvé ma troupe du Zolom de Midgar...
- Quoi ? s’étonna un jeune garçon brun. Tu t’es battu contre le Zolom ?
- qu’est-ce que tu crois... et haut la main, en plus... »
Un rire fusa dans la foule qui s’était réunie autour de lui. Ruadan foudroya du regard la personne qui en était à l’origine...et qui n’était autre que Sephiroth.
« Le Zolom ? ah ah... ce serpent géant de dix mètres de long, et de deux mètres de diamètre, qui vit dans le Marais de Midgar ?...
- Exactement. Pourquoi, petit, tu es jaloux ? répliqua-t-il d’un ton plus que méprisant.
- N’essaie pas de faire croire que toi tout seul, tu as battu ce monstre... de quel niveau es-tu, le novice ?
- Tu m’a insulté, là ? s’insurgea Ruadan.
- Non, non, je t’ai complimenté... »
    Minuki avait l’air désolée que son frère réagisse comme ça. Auparavant, il n’avait jamais essayé de chercher la bagarre...
«  Eh, vous voulez un peu d’action ? s’enhardit le guerrier roux. Je vais battre ce minable... tu es d’accord, minable ? »
   Sephiroth fit semblant de chercher quelqu’un dans la foule, puis il releva la tête, d’un air innocent. « Tu t’adressais à qui, là ?
- Joue pas au plus malin avec moi, ou tu vas le payer cher...
- Je suis paralysé de peur...
- Voilà un exemple, mes amis, d’un ennemi de la Shin-ra. C’est pourquoi je vais le vaincre, pour vous montrer que la Shin-ra triomphe toujours ! »
      Il fit signe aux badauds de s’éloigner, puis sortit son épée. Sephiroth ne prit même pas  la peine de sortir son katana, qu’il l’emportait toujours avec lui. Son regard insolent était la meilleure des armes ; il déstabilisait et mettait hors d’eux ses ennemis... et puis il prouvait ainsi qu’il était assez intelligent pour ne pas répondre à l’agression de ce petit prétentieux...
...mais le capitaine de la Shin-ra, arrivant en trombe, empoigna le bras de Ruadan.
« Mais que comptais-tu faire ? tu sais bien que si on te provoque, il ne faut pas répondre par la violence ! quelle image vas-tu donner de la Shin-ra ? »
    « Ce qu’elle est vraiment » eut envie de dire Sephiroth, mais il se retint. Il y avait déjà eu assez de problèmes, inutile d’attirer à nouveau l’attention sur lui...
       Quelques heures après, l’incident était oublié ; mais maintenant montait en Sephiroth une haine profonde de l’hypocrisie qui l’avait mené à cette vie monotone et sans attrait... On lui avait volé sa vie ! Sa vie qui aurait dû être pleine de gloire et d’action, la Shin-ra la lui avait pourrie de l’intérieur au point où il en serait venu à se détruire lui-même ! Quelle déchéance... monter si haut pour descendre si bas... Il n’était pas fait pour la vie qu’il menait là ; il lui fallait se battre et découvrir la vérité, ne pas se laisser manipuler sans rien faire ! Désormais sa décision était prise. Il userait des mêmes armes que ses ennemis : mensonge, hypocrisie... Il parviendrait à découvrir ce qui faisait si peur aux dieux. On s’est moqué de lui trop longtemps... bientôt viendra l’heure de payer.

 


 

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